Actes et Paroles, Volume 2 - 03

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l'horizon des choses, cela n'efface rien. Ce reve en arriere, auquel
s'opiniatre la memoire, est flottant comme le nuage, mais plus tenace.
L'espace n'en fait pas ce qu'il veut. Le vent en marche jour et
nuit, les quatre ouragans qui alternent a jamais, les bises, les
bourrasques, les rafales, n'emportent pas la silhouette des deux tours
jumelles, et ne dispersent pas l'arc de triomphe, le gothique beffroi
aux tocsins, et la haute colonnade roulee autour du dome souverain;
et, derriere les derniers lointains de l'abime, au-dessus du
bouleversement des ecumes et des navires, au milieu des rayons, des
nuees et des souffles, s'ebauche au fond des brumes l'immense fantome
de la cite immobile. Auguste apparition au banni. Paris, etant une
idee autant qu'une ville, a l'ubiquite. Les parisiens ont Paris, et
le monde l'a. On voudrait en sortir qu'on ne pourrait; Paris est
respirable. Quiconque vit, meme sans le connaitre, l'a en soi. A plus
forte raison ceux qui l'ont connu. La distraction sauvage de l'ocean
se complique de ce souvenir, egal aux tempetes. Quelque orage que
fasse la mer, Paris a 93. L'evocation se fait d'elle-meme, les toits
semblent surgir parmi les flots, la ville se recomposee dans toute
cette onde, et ce tremblement infini s'y ajoute. Dans la cohue des
Koules on croit entendre bruire la fourmiliere des rues. Charme
farouche. On regarde la mer et on voit Paris. Les grandes paix que
comportent ces espaces ne contrarient pas ce songe. Les vastes oublis
qui vous environnent n'y font rien; la pensee arrive au calme, mais a
un calme qui admet ce trouble; l'epaisse enveloppe des tenebres laisse
passer la lueur qui vient de derriere l'horizon, et qui est Paris. On
y pense, donc on le possede. Il se mele, indistinct, aux diffusions
muettes de la meditation. L'apaisement sublime du ciel constelle ne
suffit pas a dissoudre au fond d'un esprit cette grande figure de la
cite supreme. Ces monuments, cette histoire, ce peuple en travail,
ces femmes qui sont des deesses, ces enfants qui sont des heros,
ces revolutions commencant par la colere et finissant par le
chef-d'oeuvre, cette toute-puissance sacree d'un tourbillon
d'intelligences, ces exemples tumultueux, cette vie, cette jeunesse;
tout cela est present a l'absent; et Paris reste inoubliable, et Paris
demeure ineffacable et insubmersible, meme pour l'homme abime dans
l'ombre qui passe ses nuits en contemplation devant la serenite
eternelle, et qui a dans l'ame la stupeur profonde des etoiles.
Novembre 1875.


PENDANT L'EXIL
1852

_Commencement de l'exil. Belgique.--Depart de Belgique.--Angleterre.
Arrivee a Jersey. Declaration de guerre des proscrits a l'empire.
Fraternite des vaincus de France et des vaincus de Pologne._


I
EN QUITTANT LA BELGIQUE
A Anvers, le 1er aout 1852.

En decembre 1851, Victor Hugo fut un des cinq representants du peuple
elus par la gauche pour diriger la resistance et combattre le coup
d'etat. Ce comite des Cinq lutta depuis le 2 decembre jusqu'au 6, et
dut changer vingt-sept fois d'asile. Le massacre des boulevards, le
jeudi 4, assura la victoire du crime et ota toute chance de succes
aux defenseurs de la loi. Victor Hugo, cache dans Paris, et en
communication avec les principaux hommes des faubourgs, voulut rester
le plus longtemps possible a la disposition du peuple et epuiser
jusqu'a la derniere chance de resistance. Le 11, tout espoir etait
evanoui. Victor Hugo ne quitta Paris que ce jour-la. Il alla a
Bruxelles. La il ecrivit _l'Histoire d'un crime_ et _Napoleon le
Petit_. Ceci fit faire au gouvernement belge une loi, la loi Faider.
Cette loi, faite expres pour Victor Hugo, decretait des penalites
contre la pensee libre et declarait sacres et inviolables en Belgique
tous les princes, crimes compris. Elle s'appela du nom de son
inventeur, un nomme Faider. Ce Faider etait, a ce qu'il parait,
magistrat. Victor Hugo dut chercher un autre asile. Le 1er aout,
il s'embarqua a Anvers pour l'Angleterre. Les proscrits francais,
refugies en Belgique, vinrent l'accompagner jusqu'a l'embarquement.
L'elite des liberaux belges se joignit aux proscrits francais. Il
y eut une sorte de separation solennelle entre ces hommes, dont
plusieurs devaient mourir dans l'exil. On adressa a Victor Hugo des
paroles d'adieu, auxquelles il repondit:
Freres proscrits, amis belges,
En repondant a tant de cordiales paroles qui s'adressent a moi,
souffrez que je ne parle pas de moi et trouvez bon que je m'oublie.
Qu'importe ce qui m'arrive! J'ai ete exile de France pour avoir
combattu le guet-apens de decembre et m'etre collete avec la trahison;
je suis exile de Belgique pour avoir fait _Napoleon le Petit_. Eh
bien! je suis banni deux fois, voila tout. M. Bonaparte m'a traque
a Paris, il me traque a Bruxelles; le crime se defend; c'est tout
simple. J'ai fait mon devoir, et je continuerai de faire mon devoir.
N'en parlons plus. Certes, je souffre de vous quitter, mais est-ce que
nous ne sommes pas faits pour souffrir? Mon coeur saigne; laissons-le
saigner. Ne nous appelons-nous pas les sacrifies?
Permettez donc que je laisse de cote, ce qui me touche, pour remercier
Madier-Montjau de ses genereuses effusions, Charras de ses grandes et
belles paroles, Deschanel de sa noble et charmante eloquence, Dussoubs
et Agricol Perdiguier de leur adieu touchant, et vous-memes, nos amis
de Belgique, de vos fraternelles sympathies si fermement exprimees; je
ne sache rien de mieux, au moment de quitter cette terre hospitaliere,
au moment de nous separer peut-etre pour ne plus nous revoir, qu'une
derniere malediction a Louis Bonaparte et une derniere acclamation a
la republique.
Vive la republique, amis!
(_On crie de toutes parts_: Vive la republique! _L'orateur reprend_:)
Il y a des gens qui disent: La republique est morte. Eh bien! si elle
est morte, que le monde, absorbe a cette heure dans l'assouvissement
joyeux et brutal des interets materiels, detourne un moment la tete,
et qu'il regarde l'exil saluer le tombeau!
Proscrits, si la republique est morte, veillons le cadavre! allumons
nos ames, et laissons-les se consumer comme des cierges autour du
cercueil; restons inclines devant l'idee morte, et, apres avoir ete
ses soldats pour la defendre, soyons ses pretres pour l'ensevelir.
Mais non, la republique n'est pas morte!
Citoyens, je le declare, elle n'a jamais ete plus vivante. Elle est
dans les catacombes, ce qui est bon. Ceux-la seuls la croient morte
qui prennent les catacombes pour le tombeau. Amis, les catacombes ne
sont pas le sepulcre, les catacombes sont le berceau. Le christianisme
en est sorti la tiare en tete; la republique en sortira l'aureole au
front. La republique morte, grand Dieu! mais elle est immortelle! Mais
a quel moment dit-on cela! au moment ou elle a, en France seulement,
deux mille massacres, douze cents supplicies, dix mille deportes,
quarante mille proscrits! La republique morte! mais regardez donc
autour de vous. La terre d'exil, les pontons, les bagnes, Bellisle,
Mazas, l'Afrique, Cayenne, les fosses du Champ de Mars, le cimetiere
Montmartre, sont pleins de sa vie! Citoyens, la democratie, la
liberte, la republique est notre religion a nous. Eh bien! passez-moi
cette expression, les martyrs sont le combustible des religions. Plus
il y en a dans le brasier, plus la flamme monte, plus l'idee grandit,
plus, la verite illumine. A cette heure, proscrits, je le repete, la
republique est plus vivante et plus eblouissante que jamais, ayant
pour splendeur toutes vos miseres.
Et, au besoin, je n'en voudrais pas d'autre preuve que ce reflet d'on
ne sait quelle aurore qui eclaire en ce moment tous vos visages, a
vous, bannis, qui m'entourez. Qu'y a-t-il en effet dans vos yeux et
sur vos fronts? La joie. La sainte joie des victimes. Sans compter la
ville natale evanouie, la fortune perdue, le travail brise, le pain
qui manque, les habitudes rompues, le foyer detruit, chacun de vous a
au coeur un pere, une mere, des freres, des enfants, dont il a fallu
se separer, une femme aimee et quittee, quelque amour meurtri et
saignant; vous souffrez, vous vous tordez sur ces charbons ardents;
mais vous levez la tete, et votre oeil dit: nous sommes contents.
C'est que vous savez que la republique, votre foi, votre idee-patrie,
puise une vie nouvelle dans vos tortures. Vos douleurs sont une
affirmation. Le bucher flamboie; le martyr rayonne.
Vive la republique, citoyens!
(_On crie_: Vive la republique! _Une voix dit_: Un mot aux amis
belges! _Victor Hugo continue_:)
Je viens d'entendre une voix me crier: un mot aux amis belges! Est-ce
que vous croyez par hasard que je vais les oublier? (_Non! non!_) Les
oublier dans cet adieu! eux qui nous ont suivis jusqu'ici, eux qui
nous entourent a cette heure de leur foule intelligente et cordiale,
eux qui blament si energiquement les faiblesses de leur gouvernement,
les oublier! jamais! Petite nation, ils se sont conduits comme un
grand peuple. Ils sont accourus au-devant de nous,--vous vous en
souvenez, bannis!--quand nous arrivions a leur frontiere apres le 2
decembre, proscrits, chasses, poursuivis, la sueur au front, l'oreille
encore pleine de la rumeur du combat, la glorieuse boue des barricades
a nos habits! ils n'ont pas repousse notre adversite; ils n'ont pas
eu peur de notre contagion; gloire a eux! ils ont fait, grandement
et simplement, asseoir a leur foyer cette espece de pestiferes qu'on
appelle les vaincus.
Amis belges, j'arrive donc a vous sans transition. Vous etes nos
hotes, c'est-a-dire nos freres. On n'a pas besoin de transition pour
tendre la main a des freres.
L'un de vous, tout a l'heure, ce vaillant Louis Labarre, songeant a M.
Bonaparte, attestait en termes eloquents votre nationalite, et jurait
de mourir pour la defendre. C'est bien; je l'approuve. Nous tous
francais qui sommes ici, nous l'approuvons.
Oui, si M. Bonaparte arrive, si M. Bonaparte vous envahit, s'il vient
une nuit,--c'est son heure,--heurter vos frontieres, trainant a sa
suite, ou, pour mieux dire, poussant devant lui,--marcher en
tete n'est pas sa maniere,--poussant devant lui ce qu'il appelle
aujourd'hui la France, cette armee maintenant denationalisee, ces
regiments dont il a fait des hordes, ces pretoriens qui ont viole
l'assemblee nationale, ces janissaires qui ont sabre la constitution,
ces soldats du boulevard Montmartre, qui auraient pu etre des heros et
dont il a fait des brigands; s'il arrive a vos frontieres, cet homme,
declarant la Belgique pachalik, vous apportant la honte a vous qui
etes l'honneur, vous apportant l'esclavage a vous qui etes la liberte,
vous apportant le vol a vous qui etes la probite, oh! levez-vous,
belges, levez-vous tous! recevez Louis Bonaparte comme vos aieux les
nerviens ont recu Caligula! courez aux fourches, aux pierres, aux
faulx, aux socs de vos charrues; prenez vos couteaux, prenez vos
fusils, prenez vos carabines; sautez sur la vieille epee d'Arteveld,
sautez sur le vieux baton ferre de Coppenole, remettez, s'il le faut,
des boulets de marbre dans la grosse couleuvrine de Gand; vous en
trouverez a Notre-Dame de Hal! criez aux armes! ce n'est pas Annibal
qui est aux portes, c'est Schinderhannes! Sonnez le tocsin, battez le
rappel; faites la guerre des plaines, faites la guerre des murailles,
faites la guerre des buissons; luttez pied a pied, defendez-vous,
frappez, mourez; souvenez-vous de vos peres qui ont voulu vous leguer
la gloire, souvenez-vous de vos enfants auxquels vous devez leguer la
liberte! Empruntez a Waterloo son cri funebre: la Belgique meurt et ne
se rend pas!
Si le Bonaparte vient, faites cela!
Mais, belges, si, un jour, le front dans la lumiere, agitant au vent
joyeux des revolutions un drapeau d'une seule couleur sur lequel, vous
lirez: _Fraternite des Peuples. Etats-Unis d'Europe_,--grande, libre,
fiere, tendre, sereine, des epis et des lauriers dans les mains, la
France, la vraie France vient a vous, oh! levez-vous encore cette
fois, belges, mais pour remplacer le baton ferre par le rameau fleuri!
levez-vous, mais pour aller au-devant de la France, et pour lui dire:
Salut!
Levez-vous pour lui tendre la main, a notre mere, comme nous, ses
fils, nous vous la tendons, et pour lui ouvrir les bras comme nous
vous les ouvrons. Car cette France-la, ce ne sera pas la conquerante,
ce sera l'initiatrice; ce ne sera pas la France qui subjugue, ce sera
la France qui delivre; ce ne sera pas la France des Bonapartes, ce
sera la France des nations!
Recevez-la comme une grande amie. Accueillez-la, cette victorieuse,
comme, proscrite, vous l'avez accueillie. Car c'est elle que vous
acclamez en ce moment; car c'est la France qui est ici. C'est elle
qui, a cette heure, quelquefois meurtrie par vos gouvernants, toujours
relevee et consolee par vous, pleure a la porte de vos villes sous la
blouse de l'ouvrier ou sous le sarrau de toile du laboureur exile.
Amis, la persecution et la douleur, c'est aujourd'hui; les Etats-Unis
d'Europe, les Peuples-Freres, c'est demain. Lendemain inevitable pour
nos ennemis, infaillible pour nous. Amis, quelles que soient les
angoisses et les duretes du moment qui passe, fixons notre pensee sur
ce lendemain splendide, deja visible pour elle, sur cette immense
echeance de la liberte et de la fraternite. C'est dans cette
contemplation que vous puisez votre calme, proscrits de France.
Quelquefois, comme je vous le rappelais tout a l'heure, dans la nuit
lugubre ou vous etes, on s'etonne de voir dans vos yeux tant de
lumiere. Cette lumiere, c'est la clarte de l'avenir dont vous etes
pleins.
Citoyens francais et belges, en face des tyrans, levons haut les
nationalites; en presence de la democratie, inclinons-les. La
democratie, c'est la grande patrie. Republique universelle,
c'est patrie universelle. Au jour venu, contre les despotes, les
nationalites et les patries devront pousser le cri de guerre; l'oeuvre
faite, l'unite, la sainte unite humaine deposera au front de toutes
les nations le baiser de paix. Montons d'echelon en echelon,
d'initiation en initiation, de douleur en douleur, de misere en
misere, aux grandes formules. Que chaque degre franchi elargisse
l'horizon. Il y a quelque chose qui est au-dessus de l'allemand, du
belge, de l'italien, de l'anglais, du francais, c'est le citoyen; il
y a quelque chose qui est au-dessus du citoyen, c'est l'homme. La fin
des nations, c'est l'unite, comme la fin des racines, c'est l'arbre,
comme la fin des vents, c'est le ciel, comme la fin des fleuves,
c'est la mer. Peuples! il n'y a qu'un peuple. Vive la republique
universelle!


II
EN ARRIVANT A JERSEY
Le 5 aout 1852.

Victor Hugo ne fit que traverser l'Angleterre. Le 5 aout, il debarqua
a Jersey. Il fut recu a son arrivee par le groupe des proscrits
francais, qui l'attendaient sur le quai de Saint-Helier.
Citoyens,
Je vous remercie de votre fraternelle bienvenue. Je la rapproche avec
attendrissement de l'adieu de nos amis de Belgique. J'ai quitte
la France sur le quai d'Anvers, je la retrouve sur la jetee de
Saint-Helier.
Amis, je viens de voir en Belgique un touchant spectacle: toutes les
divisions oubliees, toutes les nuances republicaines reconciliees; une
concorde profonde, tous les systemes rallies au drapeau de l'Idee,
le rapprochement des proscrits dans les bras de l'affliction; chacun
cherchant son adversaire pour en faire son ami, et son ennemi, pour en
faire son frere; toutes les rancunes evanouies dans le doux et fier
sourire du malheur; j'ai vu cela, j'en viens, j'en ai le coeur plein,
c'est beau. Oui, toutes les mains venant les unes au-devant des
autres, tous les democrates et tous les socialistes ne faisant plus
qu'un seul republicain; pas un regard farouche, pas un front a
l'ecart; nulle exclusion; tous les passes honnetes s'acceptant, toutes
les dates de l'epreuve fraternisant, toutes les natures les plus
diverses mises d'accord, toutes, depuis les militants jusqu'aux
philosophes, depuis Charras, l'homme de guerre, jusqu'a Agricol
Perdiguier, l'homme de paix; depuis ceux qui, enfants de troupe
de l'Idee, ont eu le bonheur de naitre et de grandir dans la foi
republicaine, jusqu'a ceux qui, comme moi, nes dans d'autres rangs,
ont monte de progres en progres, d'horizon en horizon, de sacrifice en
sacrifice, a la democratie pure.
J'ai vu cela, je le repete, et c'est a nous, les nouveaux venus, d'en
feliciter la republique.
Je dis les nouveaux venus, car nous autres, les republicains d'apres
Fevrier, nous sommes, je le sais et j'y insiste, les ouvriers de la
derniere heure; mais on peut s'en vanter, quand cette derniere heure
a ete l'heure de la persecution, l'heure des larmes, l'heure du sang,
l'heure du combat, l'heure de l'exil.
J'ai vu en Belgique l'admirable spectacle de la souffrance doucement
et fermement supportee. Tous prennent part aux amertumes de l'epreuve
comme a un banquet commun. Ils s'aiment et ils croient. Oh! vous qui
etes leurs freres, laissez-moi, par une derniere illusion, prolonger
ici l'adieu que je leur ai fait! Laissez-moi glorifier ces hommes qui
souffrent si bien! ces ouvriers arraches a la ville qui nourrissait
leur corps et illuminait leur intelligence, ces paysans deracines du
champ natal; et les autres non moins meritants, lettres, professeurs,
artistes, avocats, notaires, medecins, car toutes les professions ont
eu tous les courages; laissez-moi glorifier ces bannis, ces chasses,
ces persecutes, et, au milieu de tous, ces representants du peuple
qui, apres avoir lutte trois ans a la tribune contre une coalition de
reactions, de trahisons et de haines, ont lutte quatre jours dans la
rue contre une armee! Ces representants, je les ai connus, ils sont
mes amis, laissez-moi vous en parler, permettez-moi ces effusions,
je les ai vus dans les melees; je les ai vus sur le penchant des
catastrophes; j'ai vu leur calme dans les barricades; j'ai vu, ce qui
est plus rare que le courage militaire, leur front intrepide dans les
luttes parlementaires, pendant que l'avenir mysterieux les menacait,
pendant que les fureurs de la majorite s'acharnaient sur eux, pendant
que la presse monarchique, c'est-a-dire anarchique, les insultait, que
les journaux bonapartistes, complices des premeditations sinistres de
l'Elysee, leur prodiguaient a dessein la boue et l'injure, et que la
calomnie les faisait bons pour la proscription.
Je les ai vus ensuite apres l'ecroulement, dans la peine, dans la
grande epreuve, conduisant au desert de l'exil la lugubre colonne des
sacrifies, et, moi qui les aimais, je les ai admires.
Voila ce que j'ai vu en Belgique, voila, je le sais, ce que je vais
revoir ici. Car ce grand exemple de la concorde des proscrits, dont la
France a besoin, ce beau spectacle de la fraternite pratiquee devant
lequel tombent les calomnies, la Belgique, certes, n'est point la
seule a le donner. Il se retrouve sur tous les autres radeaux de la
Meduse, sur tous les autres points ou les naufrages de la proscription
se sont groupes; il se retrouve particulierement a Jersey. Je vous en
remercie, amis, au nom de notre malheur!
Oh! scellons, consolidons, cimentons cette concorde! abjurons toute
dissidence et tout desaccord! puisque nous n'avons plus qu'une couleur
a notre drapeau, la pourpre, n'ayons plus qu'un sentiment dans nos
ames, la fraternite! La France, je le repete, a besoin de nous savoir
unis. Divises, nous la troublons; unis, nous la rassurons. Soyons unis
pour etre forts, et soyons unis pour etre heureux!
Heureux! quel mot! Et peut-on le prononcer, helas, quand la patrie
est loin, quand la liberte est morte? Oui, si l'on aime. S'aimer dans
l'affliction, c'est le bonheur du malheur.
Et comment ne nous aimerions-nous pas? Y a-t-il quelque douleur qui
n'ait pas ete egalement partagee a tous? Nous avons le meme malheur
et la meme esperance. Nous avons sur la tete le meme ciel et le meme
exil. Ce que vous pleurez, je le pleure; ce que vous regrettez, je
le regrette; ce que vous esperez, je l'attends. Etant pareils par le
sort, comment ne serions-nous pas freres par l'esprit? La larme que
nous avons dans les yeux s'appelle France, le rayon que nous avons
dans la pensee s'appelle republique. Aimons-nous! Souffrir ensemble,
c'est deja s'aimer. L'adversite, en percant nos coeurs du meme glaive,
les a traverses du meme amour.
Aimons-nous pour la patrie absente! aimons-nous pour la republique
egorgee! aimons-nous contre l'ennemi commun!
Notre but, c'est un seul peuple; notre point de depart, ce doit etre
une seule ame. Ebauchons l'unite par l'union.
Citoyens, vive la republique! Proscrits, vive la France!


III
DECLARATION A PROPOS DE L'EMPIRE
Jersey, 31 octobre 1852.

AU PEUPLE
Citoyens,
L'empire va se faire. Faut-il voter? Faut-il continuer de s'abstenir?
Telle est la question qu'on nous adresse.
Dans le departement de la Seine, un certain nombre de republicains, de
ceux qui, jusqu'a ce jour, se sont abstenus, comme ils le devaient, de
prendre part, sous quelque forme que ce fut, aux actes du gouvernement
de M. Bonaparte, sembleraient aujourd'hui ne pas etre eloignes de
penser qu'a l'occasion de l'empire une manifestation opposante de la
ville de Paris, par la voie du scrutin, pourrait etre utile, et que le
moment serait peut-etre venu d'intervenir dans le vote. Ils ajoutent
que, dans tous les cas, le vote pourrait etre un moyen de recensement
pour le parti republicain; grace au vote, on se compterait.
Ils nous demandent conseil.
Notre reponse sera simple; et ce que nous dirons pour Paris, peut etre
dit pour tous les departements.
Nous ne nous arreterons point a faire remarquer que M. Bonaparte ne
s'est pas decide a se declarer empereur sans avoir au prealable arrete
avec ses complices le nombre de voix dont il lui convient de depasser
les 7,500,000 de son 20 decembre. A l'heure qu'il est, huit millions,
neuf millions, dix millions, son chiffre est fait. Le scrutin n'y
changera rien. Nous ne prendrons pas la peine de vous rappeler ce que
c'est que le "suffrage universel" de M. Bonaparte, ce que c'est que
les scrutins de M. Bonaparte. Manifestation de la ville de Paris ou de
la ville de Lyon, recensement du parti republicain, est-ce que cela
est possible? Ou sont les garanties du scrutin? ou est le controle?
ou sont les scrutateurs? ou est la liberte? Songez a toutes ces
derisions. Qu'est-ce qui sort de l'urne? la volonte de M. Bonaparte.
Pas autre chose. M. Bonaparte a les clefs des boites dans sa main, les
Oui et les Non dans sa main, le vote dans sa main. Apres le travail
des prefets et des maires termine, ce gouvernant de grands chemins
s'enferme tete-a-tete avec le scrutin, et le depouille. Pour lui,
ajouter ou retrancher des voix, alterer un proces-verbal, inventer
un total, fabriquer un chiffre, qu'est-ce que c'est? un mensonge,
c'est-a-dire peu de chose; un faux, c'est-a-dire rien.
Restons dans les principes, citoyens. Ce que nous avons a vous dire,
le voici:
M. Bonaparte trouve que l'instant est venu de s'appeler majeste. Il
n'a pas restaure un pape pour le laisser a rien faire; il entend etre
sacre et couronne. Depuis le 2 decembre, il a le fait, le despotisme;
maintenant il veut le mot, l'empire. Soit.
Nous, republicains, quelle est notre fonction? quelle doit etre notre
attitude?
Citoyens, Louis Bonaparte est hors la loi; Louis Bonaparte est hors
l'humanite. Depuis dix mois que ce malfaiteur regne, le droit a
l'insurrection est en permanence et domine toute la situation. A
l'heure ou nous sommes, un perpetuel appel aux armes est au fond des
consciences. Or, soyons tranquilles, ce qui se revolte dans toutes les
consciences arrive bien vite a armer tous les bras.
Amis et freres! en presence de ce gouvernement infame, negation de
toute morale, obstacle a tout progres social, en presence de ce
gouvernement meurtrier du peuple, assassin de la republique et
violateur des lois, de ce gouvernement ne de la force et qui doit
perir par la force, de ce gouvernement eleve par le crime et qui doit
etre terrasse par le droit, le francais digne du nom de citoyen ne
sait pas, ne veut pas savoir s'il y a quelque part des semblants de
scrutin, des comedies de suffrage universel et des parodies d'appel a
la nation; il ne s'informe pas s'il y a des hommes qui votent et des
hommes qui font voter, s'il y a un troupeau qu'on appelle le senat
et qui delibere et un autre troupeau qu'on appelle le peuple et qui
obeit; il ne s'informe pas si le pape va sacrer au maitre-autel
de Notre-Dame l'homme qui,--n'en doutez pas, ceci est l'avenir
inevitable,--sera ferre au poteau par le bourreau;--en presence de M.
Bonaparte et de son gouvernement, le citoyen digne de ce nom ne
fait qu'une chose et n'a qu'une chose a faire: charger son fusil et
attendre l'heure.


IV
BANQUET POLONAIS
ANNIVERSAIRE DE LA REVOLUTION DE POLOGNE
29 novembre 1852.

Proscrits de Pologne,
Vous prononcez mon nom au milieu de cette fete, destinee a honorer vos
grandes luttes. Vous me faites appel. Je me leve.
Cette solennite m'est chere. Elle m'est chere doublement, et
savez-vous pourquoi, citoyens? ce n'est pas seulement parce qu'elle
rappelle a nos memoires votre heroique reveil de 1830, c'est aussi,
c'est surtout parce qu'elle glorifie une revolution, au jour, presqu'a
l'heure ou la servitude vote l'empire.
Oui, ceci me plait, ceci me convient. Cette communion, a laquelle
j'assiste, cette communion de la France exilee et de la Pologne
proscrite dans un illustre souvenir, dans une date memorable, a le
haut caractere d'un acte de foi. Oui, citoyens, c'est au moment ou il
semble que les cercueils se ferment qu'il faut affirmer la vie.
Qu'aujourd'hui, ici, dans cette ile, a l'instant ou, en France, on
salue empereur le bandit du 2 decembre, que vos voix genereuses, que
vos paroles inspirees, que vos chants patriotiques repondent, comme un
echo de la conscience humaine, a ces acclamations infames!
Et maintenant, permettez-moi de me recueillir en presence de la date
qui nous rassemble et que je vois inscrite sur ce mur.
La Pologne! le 29 novembre 1830! quelle nation! quel anniversaire!
Citoyens, aujourd'hui, tout au travers de cet amas enorme de contrats
execrables qui constituent ce que les chancelleries appellent le
droit public actuel de l'Europe, au milieu de ces brocantages de
territoires, de ces achats de peuples, de ces ventes de nations, au
milieu de ce tas odieux de parchemins scelles de tous les sceaux
imperiaux et royaux qui a pour premiere page le traite de partage, de
1772 et pour derniere page le traite de partage de 1815, on voit un
trou, un trou profond, terrible, menacant, une plaie beante qui perce
la liasse de part en part. Et ce trou, qui l'a fait? le sabre de la
Pologne. En combien de coups? en un seul. Et quel jour? le 29 novembre
1830.
Le 29 novembre 1830, la Pologne a senti que le moment etait venu
d'empecher la prescription de sa nationalite, et ce jour-la, elle a
donne ce coup de sabre effrayant.
Depuis, ce sabre a ete brise. _L'ordre_, on a dit ce mot hideux,
_l'ordre a regne a Varsovie!_ Ce peuple, qui etait un heros, est
redevenu un esclave et a repris sa souquenille de galerien. Des
princes dignes du bagne ont remis a la chaine ce forcat digne de
l'aureole.
O polonais, vous avez presque le droit de vous tourner vers nous, fils
de l'Europe, avec amertume. Mon coeur se serre en songeant a vous. Le
traite de 1772, perpetre et commis a la face de la France, en pleine
lumiere de la philosophie et de la civilisation, dans ce plein midi
que Voltaire et Rousseau faisaient sur le monde, le traite de 1772
est la grande tache du dix-huitieme siecle comme le 2 decembre est
la grande honte du dix-neuvieme. Pendant toute une longue periode
historique,--et je n'ai pas attendu ce jour pour le dire, je le
rappelais le 19 mars 1846 a l'assemblee politique dont je faisais
partie,--depuis les premieres annees de Henri II jusqu'aux dernieres
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