Œuvres de Voltaire Tome XIX: Siècle de Louis XIV.—Tome I - 26

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défense de Lille, qui lui a fait tant d’honneur. Ceux qui ont écrit
l’histoire de Louis XIV ont copié servilement le marquis de Feuquières
pour la guerre, ainsi que l’abbé de Choisi pour les anecdotes. Ils ne
pouvaient pas savoir que Feuquières, d’ailleurs excellent officier, et
connaissant la guerre par principes et par expérience, était un esprit
non moins chagrin qu’éclairé, l’Aristarque et quelquefois le Zoïle des
généraux; il altère des faits pour avoir le plaisir de censurer des
fautes. Il se plaignait de tout le monde, et tout le monde se plaignait
de lui. On disait qu’il était le plus brave homme de l’Europe,
parcequ’il dormait au milieu de cent mille de ses ennemis. Sa capacité
n’ayant pas été récompensée par le bâton de maréchal de France, il
employa trop contre ceux qui servaient l’état des lumières qui eussent
été très utiles, s’il eût eu l’esprit aussi conciliant que pénétrant,
appliqué, et hardi.
Il reprocha au maréchal de Villeroi plus de fautes, et de plus
essentielles qu’à Boufflers. Villeroi, à la tête d’environ quatre-vingt
mille hommes, devait secourir Namur; mais, quand même les maréchaux
de Villeroi et de Boufflers eussent fait généralement tout ce qui se
pouvait faire (ce qui est bien rare), il fallait, par la situation du
terrain, que Namur ne fût point secourue, et se rendît tôt ou tard.
Les bords de la Méhaigne, couverts d’une armée d’observation qui avait
arrêté les secours du roi Guillaume, arrêtèrent alors nécessairement
ceux du maréchal de Villeroi.
Le maréchal de Boufflers, le comte de Guiscard, gouverneur de la ville,
le comte du Châtelet de Lomont, commandant de l’infanterie, tous les
officiers et les soldats défendirent la ville avec une opiniâtreté et
une bravoure admirable, mais qui ne recula pas la prise de deux jours.
Quand une ville est assiégée par une armée supérieure, que les travaux
sont bien conduits, et que la saison est favorable, on sait à peu près
en combien de temps elle sera prise, quelque vigoureuse que la défense
puisse être. Le roi Guillaume se rendit maître de la ville et de la
citadelle, qui lui coûtèrent plus de temps qu’à Louis XIV (septembre
1695).
Le roi, pendant qu’il perdait Namur, fit bombarder Bruxelles: vengeance
inutile, qu’il prenait sur le roi d’Espagne, de ses villes bombardées
par les Anglais. Tout cela fesait une guerre ruineuse et funeste aux
deux partis.
C’est, depuis deux siècles, un des effets de l’industrie et de la
fureur des hommes, que les désolations de nos guerres ne se bornent
pas à notre Europe. Nous nous épuisons d’hommes et d’argent pour
aller nous détruire aux extrémités de l’Asie et de l’Amérique. Les
Indiens, que nous avons obligés par force et par adresse à recevoir nos
établissements, et les Américains dont nous avons ensanglanté et ravi
le continent, nous regardent comme des ennemis de la nature humaine,
qui accourent du bout du monde pour les égorger, et pour se détruire
ensuite eux-mêmes.
Les Français n’avaient de colonies dans les grandes Indes que celle de
Pondichéri, formée par les soins de Colbert avec des dépenses immenses,
dont le fruit ne pouvait être recueilli qu’au bout de plusieurs années.
Les Hollandais s’en saisirent aisément, et ruinèrent aux Indes le
commerce de la France à peine établi.
(1695) Les Anglais détruisirent les plantations de la France à
Saint-Domingue. (1696) Un armateur de Brest ravagea celles qu’ils
avaient à Gambie dans l’Afrique. Les armateurs de Saint-Malo
portèrent le fer et le feu à Terre-Neuve sur la côte orientale qu’ils
possédaient. Leur île de la Jamaïque fut insultée par les escadres
françaises, leurs vaisseaux pris et brûlés, leurs côtes saccagées.
Pointis, chef d’escadre, à la tête de plusieurs vaisseaux du roi et de
quelques corsaires de l’Amérique, alla surprendre (mai 1697) auprès de
la ligne la ville de Carthagène, magasin et entrepôt des trésors que
l’Espagne tire du Mexique. Le dommage qu’il y causa fut estimé vingt
millions de nos livres, et le gain, dix millions. Il y a toujours
quelque chose à rabattre de ces calculs, mais rien des calamités
extrêmes que causent ces expéditions glorieuses.
Les vaisseaux marchands de Hollande et d’Angleterre étaient tous les
jours la proie des armateurs de France, et surtout de Du Guay-Trouin,
homme unique en son genre, auquel il ne manquait que de grandes
flottes, pour avoir la réputation de Dragut ou de Barberousse.
Jean Bart se fit aussi une grande réputation parmi les corsaires.
De simple matelot il devint enfin chef d’escadre, ainsi que Du
Guay-Trouin. Leurs noms sont encore illustres.
Les ennemis prenaient moins de vaisseaux marchands français, parcequ’il
y en avait moins. La mort de Colbert et la guerre avaient beaucoup
diminué le commerce.
Le résultat des expéditions de terre et de mer était donc le malheur
universel. Ceux qui ont plus d’humanité que de politique remarqueront
que, dans cette guerre, Louis XIV était armé contre son beau-frère, le
roi d’Espagne; contre l’électeur de Bavière, dont il avait donné la
sœur à son fils le dauphin; contre l’électeur palatin, dont il brûla
les états après avoir marié Monsieur à la princesse palatine. Le roi
Jacques fut chassé du trône par son gendre et par sa fille. Depuis même
on a vu[524] le duc de Savoie ligué encore contre la France, où l’une
de ses filles était dauphine, et contre l’Espagne, où l’autre était
reine. La plupart des guerres entre les princes chrétiens sont des
espèces de guerres civiles.
L’entreprise la plus criminelle de toute cette guerre fut la seule
véritablement heureuse. Guillaume réussit toujours pleinement en
Angleterre et en Irlande. Ailleurs les succès furent balancés. Quand
j’appelle cette entreprise criminelle, je n’examine pas si la nation,
après avoir répandu le sang du père, avait tort ou raison de proscrire
le fils, et de défendre sa religion et ses droits; je dis seulement
que, s’il y a quelque justice sur la terre, il n’appartenait pas à la
fille et au gendre du roi Jacques de le chasser de sa maison. Cette
action serait horrible entre des particuliers; l’intérêt des peuples
semble établir une autre morale pour les princes.


CHAPITRE XVII.
Traité avec la Savoie. Mariage du duc de Bourgogne. Paix de
Rysvick. État de la France et de l’Europe. Mort et Testament de
Charles II, roi d’Espagne.

La France conservait encore sa supériorité sur tous ses ennemis. Elle
en avait accablé quelques uns, comme la Savoie et le Palatinat. Elle
fesait la guerre sur les frontières des autres. C’était un corps
puissant et robuste, fatigué d’une longue résistance, et épuisé par ses
victoires. Un coup porté à propos l’eût fait chanceler. Quiconque a
plusieurs ennemis à-la-fois, ne peut avoir, à la longue, de salut que
dans leur division ou dans la paix. Louis XIV obtint bientôt l’un et
l’autre.
Victor-Amédée, duc de Savoie, était celui de tous les princes qui
prenait le plus tôt son parti, quand il s’agissait de rompre ses
engagements pour ses intérêts. Ce fut à lui que la cour de France
s’adressa. Le comte de Tessé, depuis maréchal de France, homme habile
et aimable, d’un génie fait pour plaire, qui est le premier talent
des négociateurs, agit d’abord sourdement à Turin. Le maréchal de
Catinat, aussi propre à faire la paix que la guerre, acheva la
négociation. Il n’était pas besoin de deux hommes habiles pour
déterminer le duc de Savoie à recevoir ses avantages. On lui rendait
son pays; on lui donnait de l’argent; on proposait le mariage de sa
fille avec le jeune duc de Bourgogne, fils de Monseigneur, héritier
de la couronne de France. On fut bientôt d’accord (juillet 1696): le
duc et Catinat conclurent le traité à Notre-Dame de Lorette, où ils
allèrent sous prétexte d’un pèlerinage de dévotion qui ne fit prendre
le change à personne. Le pape (c’était alors Innocent XII) entrait
ardemment dans cette négociation. Son but était de délivrer à-la-fois
l’Italie, et des invasions des Français, et des taxes continuelles
que l’empereur exigeait pour payer ses armées. On voulait que les
Impériaux laissassent l’Italie neutre. Le duc de Savoie s’engageait
par le traité à obtenir cette neutralité. L’empereur répondit d’abord
par des refus: car la cour de Vienne ne se déterminait guère qu’à
l’extrémité. Alors le duc de Savoie joignit ses troupes à l’armée
française. Ce prince devint, en moins d’un mois, de généralissime de
l’empereur, généralissime de Louis XIV. On amena sa fille en France,
pour épouser, à onze ans (1697), le duc de Bourgogne qui en avait
treize. Après la défection du duc de Savoie, il arriva, comme à la paix
de Nimègue, que chacun des alliés prit le parti de traiter. L’empereur
accepta d’abord la neutralité d’Italie. Les Hollandais proposèrent le
château de Rysvick, près de La Haye, pour les conférences d’une paix
générale. Quatre armées que le roi avait sur pied servirent à hâter
les conclusions. Quatre-vingt mille hommes étaient en Flandre sous
Villeroi. Le maréchal de Choiseul en avait quarante mille sur les bords
du Rhin. Catinat en avait encore autant en Piémont. Le duc de Vendôme,
parvenu enfin au généralat, après avoir passé par tous les degrés
depuis celui de garde du roi, comme un soldat de fortune, commandait
en Catalogne, où il gagna un combat, et où il prit Barcelone (août
1697). Ces nouveaux efforts et ces nouveaux succès furent la médiation
la plus efficace. La cour de Rome offrit encore son arbitrage, et
fut refusée comme à Nimègue. Le roi de Suède, Charles XI, fut le
médiateur. (Septembre, octobre 1697) Enfin la paix se fit, non plus
avec cette hauteur et ces conditions avantageuses qui avaient signalé
la grandeur de Louis XIV, mais avec une facilité et un relâchement de
ses droits qui étonnèrent également les Français et les alliés. On a
cru long-temps que cette paix avait été préparée par la plus profonde
politique.
On prétendait que le grand projet du roi de France était et devait être
de ne pas laisser tomber toute la succession de la vaste monarchie
espagnole dans l’autre branche de la maison d’Autriche. Il espérait,
disait-on, que la maison de Bourbon en arracherait au moins quelque
démembrement; et que peut-être un jour elle l’aurait tout entière. Les
renonciations authentiques de la femme et de la mère de Louis XIV ne
paraissaient que de vaines signatures, que des conjonctures nouvelles
devaient anéantir. Dans ce dessein, qui agrandissait ou la France ou la
maison de Bourbon, il était nécessaire de montrer quelque modération
à l’Europe, pour ne pas effaroucher tant de puissances toujours
soupçonneuses. La paix donnait le temps de se faire de nouveaux alliés,
de rétablir les finances, de gagner ceux dont on aurait besoin, et
de laisser former dans l’état de nouvelles milices. Il fallait céder
quelque chose dans l’espérance d’obtenir beaucoup plus.
On pensa que c’étaient là les motifs secrets de cette paix de Rysvick,
qui en effet procura par l’événement le trône d’Espagne au petit-fils
de Louis XIV. Cette idée, si vraisemblable, n’est pas vraie; ni Louis
XIV ni son conseil n’eurent ces vues qui semblaient devoir se présenter
à eux. C’est un grand exemple de cet enchaînement des révolutions de ce
monde, qui entraînent les hommes par lesquels elles semblent conduites.
L’intérêt visible de posséder bientôt l’Espagne, ou une partie de cette
monarchie, n’influa en rien dans la paix de Rysvick. Le marquis de
Torci en fait l’aveu dans ses Mémoires[525] manuscrits. On fit la paix
par lassitude de la guerre, et cette guerre avait été presque sans
objet: du moins elle n’avait été, du côté des alliés, que le dessein
vague d’abaisser la grandeur de Louis XIV; et dans ce monarque, que
la suite de cette même grandeur qui n’avait pas voulu plier. Le roi
Guillaume avait entraîné dans sa cause l’empereur, l’empire, l’Espagne,
les Provinces-Unies, la Savoie. Louis XIV s’était vu trop engagé pour
reculer. La plus belle partie de l’Europe avait été ravagée, parceque
le roi de France avait usé avec trop de hauteur de ses avantages après
la paix de Nimègue. C’était contre sa personne qu’on s’était ligué
plutôt que contre la France. Le roi croyait avoir mis en sûreté la
gloire que donnent les armes; il voulut avoir celle de la modération;
et l’épuisement qui se fesait sentir dans les finances ne lui rendit
pas cette modération difficile.
Les affaires politiques se traitaient dans le conseil: les résolutions
s’y prenaient. Le marquis de Torci, encore jeune, n’était chargé que de
l’exécution. Tout le conseil voulait la paix. Le duc de Beauvilliers,
surtout, y représentait avec force la misère des peuples: madame de
Maintenon en était touchée; le roi n’y était pas insensible. Cette
misère fesait d’autant plus d’impression, qu’on tombait de cet état
florissant où le ministre Colbert avait mis le royaume. Les grands
établissements en tout genre avaient prodigieusement coûté, et
l’économie ne réparait pas le dérangement de ces dépenses forcées. Ce
mal intérieur étonnait, parcequ’on ne l’avait jamais senti depuis
que Louis XIV gouvernait par lui-même. Voilà les causes de la paix
de Rysvick[526]. Des sentiments vertueux y influèrent certainement.
Ceux qui pensent que les rois et leurs ministres sacrifient sans cesse
et sans mesure à l’ambition, ne se trompent pas moins que celui qui
penserait qu’ils sacrifient toujours au bonheur du monde.
Le roi rendit donc à la branche autrichienne d’Espagne tout ce qu’il
lui avait pris vers les Pyrénées, et ce qu’il venait de lui prendre en
Flandre dans cette dernière guerre; Luxembourg, Mons, Ath, Courtrai.
Il reconnut pour roi légitime d’Angleterre le roi Guillaume, traité
jusqu’alors de prince d’Orange, d’usurpateur, et de tyran. Il promit de
ne donner aucun secours à ses ennemis. Le roi Jacques, dont le nom fut
omis dans le traité, resta dans Saint-Germain, avec le nom inutile de
roi, et des pensions de Louis XIV. Il ne fit plus que des manifestes,
sacrifié par son protecteur à la nécessité, et déjà oublié de l’Europe.
Les jugements rendus par les chambres de Brisach[527] et de Metz contre
tant de souverains, et les réunions faites à l’Alsace, monuments d’une
puissance et d’une fierté dangereuse, furent abolis; et les bailliages
juridiquement saisis furent rendus à leurs maîtres légitimes.
Outre ces désistements, on restitua à l’empire Fribourg, Brisach,
Kehl, Philipsbourg. On se soumit à raser les forteresses de Strasbourg
sur le Rhin, le Fort-Louis, Trarbach, le Mont-Royal; ouvrages où Vauban
avait épuisé son art, et le roi ses finances. On fut surpris dans
l’Europe, et mécontent en France, que Louis XIV eût fait la paix comme
s’il eût été vaincu. Harlai, Créci, et Callières, qui avaient signé
cette paix, n’osaient se montrer, ni à la cour, ni à la ville; on les
accablait de reproches et de ridicules, comme s’ils avaient fait un
seul pas qui n’eût été ordonné par le ministère. La cour de Louis XIV
leur reprochait d’avoir trahi l’honneur de la France, et depuis on
les loua d’avoir préparé, par ce traité, la succession à la monarchie
espagnole; mais ils ne méritèrent ni les critiques ni les louanges.
Ce fut enfin par cette paix que la France rendit la Lorraine à la
maison qui la possédait depuis sept cents années. Le duc Charles V,
appui de l’empire et vainqueur des Turcs, était mort. Son fils Léopold
prit, à la paix de Rysvick, possession de sa souveraineté; dépouillé à
la vérité de ses droits réels, car il n’était pas permis au duc d’avoir
des remparts à sa capitale; mais on ne put lui ôter un droit plus beau,
celui de faire du bien à ses sujets; droit dont jamais aucun prince n’a
si bien usé que lui.
Il est à souhaiter que la dernière postérité apprenne qu’un des moins
grands souverains de l’Europe a été celui qui a fait le plus de bien à
son peuple. Il trouva la Lorraine désolée et déserte: il la repeupla,
il l’enrichit. Il l’a conservée toujours en paix, pendant que le
reste de l’Europe a été ravagé par la guerre. Il a eu la prudence
d’être toujours bien avec la France, et d’être aimé dans l’empire;
tenant heureusement ce juste milieu qu’un prince sans pouvoir n’a
presque jamais pu garder entre deux grandes puissances. Il a procuré
à ses peuples l’abondance qu’ils ne connaissaient plus. Sa noblesse,
réduite à la dernière misère, a été mise dans l’opulence par ses seuls
bienfaits. Voyait-il la maison d’un gentilhomme en ruine, il la fesait
rebâtir à ses dépens: il payait leurs dettes; il mariait leurs filles;
il prodiguait des présents, avec cet art de donner, qui est encore
au-dessus des bienfaits: il mettait dans ses dons la magnificence d’un
prince et la politesse d’un ami. Les arts, en honneur dans sa petite
province, produisaient une circulation nouvelle qui fait la richesse
des états. Sa cour était formée sur le modèle de celle de France.
On ne croyait presque pas avoir changé de lieu quand on passait de
Versailles à Lunéville. A l’exemple de Louis XIV, il fesait fleurir
les belles-lettres. Il a établi dans Lunéville une espèce d’université
sans pédantisme, où la jeune noblesse d’Allemagne venait se former.
On y apprenait de véritables sciences dans des écoles où la physique
était démontrée aux yeux par des machines admirables. Il a cherché les
talents jusque dans les boutiques et dans les forêts, pour les mettre
au jour et les encourager. Enfin, pendant tout son règne, il ne s’est
occupé que du soin de procurer à sa nation de la tranquillité, des
richesses, des connaissances, et des plaisirs. «Je quitterais demain ma
souveraineté, disait-il, si je ne pouvais faire du bien.» Aussi a-t-il
goûté le bonheur d’être aimé; et j’ai vu, long-temps après sa mort,
ses sujets verser des larmes en prononçant son nom. Il a laissé, en
mourant, son exemple à suivre aux plus grands rois, et il n’a pas peu
servi à préparer à son fils[528] le chemin du trône de l’empire.
Dans le temps que Louis XIV ménageait la paix de Rysvick, qui devait
lui valoir la succession d’Espagne, la couronne de Pologne vint à
vaquer. C’était la seule couronne royale au monde qui fût alors
élective: citoyens et étrangers y peuvent prétendre. Il faut, pour
y parvenir, ou un mérite assez éclatant et assez soutenu par les
intrigues pour entraîner les suffrages, comme il était arrivé à Jean
Sobieski, dernier roi; ou bien des trésors assez grands pour acheter ce
royaume, qui est presque toujours à l’enchère.
L’abbé de Polignac, depuis cardinal, eut d’abord l’habileté de disposer
les suffrages en faveur de ce prince de Conti connu par les actions
de valeur qu’il avait faites à Steinkerque et à Nervinde. Il n’avait
jamais commandé en chef; il n’entrait point dans les conseils du
roi; Monsieur le Duc avait autant de réputation que lui à la guerre;
monsieur de Vendôme en avait davantage: cependant sa renommée effaçait
alors les autres noms par le grand art de plaire et de se faire valoir,
que jamais on ne posséda mieux que lui. Polignac, qui avait celui de
persuader, détermina d’abord les esprits en sa faveur. Il balança, avec
de l’éloquence et des promesses, l’argent qu’Auguste, électeur de Saxe,
prodiguait. Louis-François, prince de Conti, fut élu (27 juin 1697)
roi par le plus grand parti, et proclamé par le primat du royaume.
Auguste fut élu deux heures après par un parti beaucoup moins nombreux:
mais il était prince souverain et puissant; il avait des troupes prêtes
sur les frontières de Pologne. Le prince de Conti était absent, sans
argent, sans troupes, sans pouvoir; il n’avait pour lui que son nom et
le cardinal de Polignac. Il fallait, ou que Louis XIV l’empêchât de
recevoir l’offre de la couronne, ou qu’il lui donnât de quoi l’emporter
sur son rival. Le ministère français passa pour en avoir fait trop
en envoyant le prince de Conti, et trop peu en ne lui donnant qu’une
faible escadre et quelques lettres-de-change, avec lesquelles il arriva
à la rade de Dantzick. On parut se conduire avec cette politique
mitigée qui commence les affaires pour les abandonner. Le prince de
Conti ne fut pas seulement reçu à Dantzick. Ses lettres-de-change
y furent protestées. Les intrigues du pape, celles de l’empereur,
l’argent et les troupes de Saxe, assuraient déjà la couronne à son
rival. Il revint avec la gloire d’avoir été élu. La France eut la
mortification de faire voir qu’elle n’avait pas assez de force pour
faire un roi de Pologne.
Cette disgrace du prince de Conti ne troubla point la paix du Nord
entre les chrétiens. Le midi de l’Europe fut tranquille bientôt après
par la paix de Rysvick. Il ne restait plus de guerre que celle que les
Turcs fesaient à l’Allemagne, à la Pologne, à Venise, et à la Russie.
Les chrétiens, quoique mal gouvernés et divisés entre eux, avaient
dans cette guerre la supériorité. (1ᵉʳ septembre 1697) La bataille
de Zenta, où le prince Eugène battit le grand-seigneur en personne,
fameuse par la mort d’un grand-vizir, de dix-sept bachas, et de plus
de vingt mille Turcs, abaissa l’orgueil ottoman, et procura la paix de
Carlovitz (1699), où les Turcs reçurent la loi. Les Vénitiens eurent
la Morée; les Moscovites, Azof; les Polonais, Kaminieck; l’empereur,
la Transylvanie. La chrétienté fut alors tranquille et heureuse; on
n’entendait parler de guerre ni en Asie ni en Afrique. Toute la terre
était en paix vers les deux dernières années du dix-septième siècle,
époque d’une trop courte durée.
Les malheurs publics recommencèrent bientôt. Le Nord fut troublé, dès
l’an 1700, par les deux hommes les plus singuliers qui fussent sur la
terre. L’un était le czar Pierre Alexiovitz, empereur de Russie, et
l’autre le jeune Charles XII, roi de Suède. Le czar Pierre, supérieur
à son siècle et à sa nation, a été, par son génie et par ses travaux,
le réformateur ou plutôt le fondateur de son empire. Charles XII, plus
courageux, mais moins utile à ses sujets, fait pour commander à des
soldats et non à des peuples, a été le premier des héros de son temps;
mais il est mort avec la réputation d’un roi imprudent. La désolation
du Nord, dans une guerre de dix-huit années, a dû son origine à la
politique ambitieuse du czar, du roi de Danemark, et du roi de Pologne,
qui voulurent profiter de la jeunesse de Charles XII pour lui ravir une
partie de ses états. (1700) Le roi Charles, à l’âge de seize ans[529],
les vainquit tous trois. Il fut la terreur du Nord, et passa déjà pour
un grand homme dans un âge où les autres hommes n’ont pas reçu encore
toute leur éducation. Il fut neuf ans le roi le plus redoutable qui fût
au monde, et neuf autres années le plus malheureux.
Les troubles du midi de l’Europe ont eu une autre origine. Il
s’agissait de recueillir les dépouilles du roi d’Espagne, dont la
mort s’approchait. Les puissances qui dévoraient déjà en idée cette
succession immense, fesaient ce que nous voyons souvent dans la
maladie d’un riche vieillard sans enfants. Sa femme, ses parents, des
prêtres, des officiers préposés pour recevoir les dernières volontés
des mourants, l’assiégent de tous côtés pour arracher de lui un mot
favorable: quelques héritiers consentent à partager ses dépouilles;
d’autres s’apprêtent à les disputer.
Louis XIV et l’empereur Léopold étaient au même degré: tous deux
descendaient de Philippe III par les femmes; mais Louis était fils de
l’aînée. Le dauphin avait un plus grand avantage encore sur les enfants
de l’empereur, c’est qu’il était petit-fils de Philippe IV, et les
enfants de Léopold n’en descendaient pas. Tous les droits de la nature
étaient donc dans la maison de France. On n’a qu’à jeter un coup d’œil
sur la table suivante.

_Branche française._ | ROIS D’ESPAGNE. | _Branche allemande._

PHILIPPE III.
/--------------------------------/ \---------------------------------------\
|
ANNE-MARIE, l’aînée, PHILIPPE IV. MARIE-ANNE, la cadette,
femme de LOUIS XIII, | épouse de FERDINAND III,
en 1615. | empereur, en 1631.
| | |
| | |
| | |
| | |
LOUIS XIV épouse, en CHARLES II. LÉOPOLD, fils de FERDINAND
1660, MARIE-THÉRÈSE, III et de MARIE-ANNE,
fille aînée de PHILIPPE épouse, en 1666,
IV. MARGUERITE-THÉRÈSE,
| fille cadette de PHILIPPE
| IV, dont il eut,
| |
| |
| |
| |
| |
MONSEIGNEUR. MARIE-ANTOINETTE-JOSÈPHE,
| mariée à l’électeur
| de Bavière MAXIMILIEN-EMMANUEL,
| qui
| eut d’elle,
| |
| |
| |
| |
Le duc de Bourgogne. JOSEPH-FERDINAND-LÉOPOLD
DE BAVIÈRE, nommé
Le duc d’Anjou, roi héritier de toute la
d’Espagne. monarchie-espagnole, à
l’âge de quatre ans.
Le duc de Berri.
Mais la maison de l’empereur comptait pour ses droits, premièrement
les renonciations authentiques et ratifiées de Louis XIII et de Louis
XIV à la couronne d’Espagne, ensuite le nom d’Autriche; le sang de
Maximilien, dont Léopold et Charles II descendaient; l’union presque
toujours constante des deux branches autrichiennes; la haine encore
plus constante de ces deux branches contre les Bourbons; l’aversion
que la nation espagnole avait alors pour la nation française; enfin,
les ressorts d’une politique en possession de gouverner le conseil
d’Espagne.
Rien ne paraissait plus naturel alors que de perpétuer le trône
d’Espagne dans la maison d’Autriche. L’Europe entière s’y attendait
avant la paix de Rysvick; mais la faiblesse de Charles II avait dérangé
dès l’année 1696 cet ordre de succession; et le nom autrichien avait
déjà été sacrifié en secret. Le roi d’Espagne avait un petit-neveu,
fils de l’électeur de Bavière Maximilien-Emmanuel[530]. La mère du
roi, qui vivait encore, était bisaïeule de ce jeune prince de Bavière,
âgé alors de quatre ans; et quoique cette reine-mère fût de la maison
d’Autriche, étant fille de l’empereur Ferdinand III, elle obtint de son
fils que la race impériale fût déshéritée. Elle était piquée contre la
cour de Vienne. Elle jeta les yeux sur ce prince bavarois sortant du
berceau pour le destiner à la monarchie d’Espagne et du Nouveau-Monde.
Charles II, alors gouverné par elle[531], fit un testament secret
en faveur du prince électoral de Bavière, en 1696. Charles, ayant
depuis perdu sa mère, fut gouverné par sa femme, Marie-Anne de
Bavière-Neubourg. Cette princesse bavaroise, belle-sœur de l’empereur
Léopold, était aussi attachée à la maison d’Autriche que la reine-mère
autrichienne avait été affectionnée au sang de Bavière. Ainsi le
cours naturel des choses fut toujours interverti dans cette affaire,
où il s’agissait de la plus vaste monarchie du monde. Marie-Anne de
Bavière fit déchirer le testament qui appelait le jeune Bavarois à la
succession, et le roi promit à sa femme qu’il n’aurait jamais d’autre
héritier qu’un fils de l’empereur Léopold, et qu’il ne ruinerait pas
la maison d’Autriche. Les choses étaient en ces termes à la paix
de Rysvick. Les maisons de France et d’Autriche se craignaient et
s’observaient, et elles avaient l’Europe à craindre. L’Angleterre, et
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