Œuvres de Voltaire Tome XIX: Siècle de Louis XIV.—Tome I - 12

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Boisguillebert[330]. Elle n’a pu être exécutée, et est en effet
impraticable. On a de lui plusieurs Mémoires dignes d’un bon citoyen.
Il contribua beaucoup par ses conseils à la construction du canal
de Languedoc. Observons qu’il était très ignorant, qu’il l’avouait
avec franchise, mais qu’il ne s’en vantait pas. Un grand courage, un
zèle que rien ne rebutait, un talent naturel pour les sciences de
combinaisons, de l’opiniâtreté dans le travail, le coup d’œil dans les
occasions, qui ne se trouve pas toujours ni avec les connaissances
ni avec le talent; telles furent les qualités auxquelles il dut sa
réputation. Il a prouvé, par sa conduite, qu’il pouvait y avoir des
citoyens dans un gouvernement absolu. Mort en 1707.
VAUGELAS (Claude Favre de), né à Bourg-en-Bresse, en 1585. C’est un des
premiers qui ont épuré et réglé la langue, et de ceux qui pouvaient
faire des vers italiens sans en pouvoir faire de français. Il retoucha
pendant trente ans sa traduction de Quinte-Curce. Tout homme qui veut
bien écrire doit corriger ses ouvrages toute sa vie. Mort en 1650.
VERGIER (Jacques), né à Paris, en 1657[331]. Il est, à l’égard de
La Fontaine, ce que Campistron est à Racine; imitateur faible, mais
naturel: mort assassiné à Paris par des voleurs, en 1720. On laisse
entendre, dans le _Moréri_, qu’il avait fait une parodie contre un
prince puissant qui le fit tuer. Ce conte est faux[332].
VERTOT (Réné Auber de), né en Normandie[333], en 1655. Historien
agréable et élégant. Mort en 1735.
VILLARS (le maréchal, Louis-Claude duc de), né en 1652. Le premier tome
des Mémoires qui portent son nom est entièrement de lui[334]. Il savait
par cœur les beaux endroits de Corneille, de Racine, et de Molière. Je
lui ai entendu dire un jour à un homme d’état fort célèbre, qui était
étonné qu’il sût tant de vers de comédie: «J’en ai moins joué que vous,
mais j’en sais davantage.» Mort en 1734.
VILLEDIEU[335] (Marie-Catherine Desjardins, plus connue sous le nom
de madame de). Ses romans lui firent de la réputation. Au reste, on
est bien éloigné de vouloir donner ici quelque prix à tous ces romans
dont la France a été et est encore inondée; ils ont presque tous été,
excepté _Zaïde_, des productions d’esprits faibles qui écrivent avec
facilité des choses indignes d’être lues par les esprits solides: ils
sont même pour la plupart dénués d’imagination; et il y en a plus dans
quatre pages de l’Arioste que dans tous ces insipides écrits qui
gâtent le goût des jeunes gens. Née à Alençon, vers 1640; morte en 1683.
VILLIERS (Pierre de), né à Coignac, en 1648, jésuite. Il cultiva
les lettres, comme tous ceux qui sont sortis de cet ordre. Ses
sermons, et son _Poëme sur l’art de prêcher_, eurent de son temps
quelque réputation. Ses stances sur la solitude sont fort au-dessus
de celles de Saint-Amant, qu’on avait tant vantées, mais ne sont
pas encore tout-à-fait dignes d’un siècle si au-dessus de celui de
Saint-Amant[336]. Mort en 1728.
VOITURE (Vincent), né à Amiens, en 1598. C’est le premier qui fut en
France ce qu’on appelle un bel esprit. Il n’eut guère que ce mérite
dans ses écrits, sur lesquels on ne peut se former le goût[337]; mais
ce mérite était alors très rare. On a de lui de très jolis vers, mais
en petit nombre. Ceux qu’il fit pour la reine Anne d’Autriche, et qu’on
n’imprima pas dans son recueil, sont un monument de cette liberté
galante qui régnait à la cour de cette reine, dont les frondeurs
lassèrent la douceur et la bonté.
...
...
Je pensois si le cardinal,
J’entends celui de La Valette,
Pouvoit voir l’éclat sans égal
Dans lequel maintenant vous ête[338];
J’entends celui de la beauté;
Car auprès je n’estime guère,
Cela soit dit sans vous déplaire,
Tout l’éclat de la majesté[339].
Il fit aussi des vers italiens et espagnols avec succès. Mort en 1648.
Ce n’est pas la peine de pousser plus loin ce catalogue. On y voit
un petit nombre de grands génies, un assez grand d’imitateurs, et on
pourrait donner une liste beaucoup plus longue des savants. Il sera
difficile désormais qu’il s’élève des génies nouveaux, à moins que
d’autres mœurs, une autre sorte de gouvernement, ne donnent un tour
nouveau aux esprits. Il sera impossible qu’il se forme des savants
universels, parceque chaque science est devenue immense. Il faudra
nécessairement que chacun se réduise à cultiver une petite partie du
vaste champ que le siècle de Louis XIV a défriché.


ARTISTES CÉLÈBRES.

MUSICIENS.
La musique française, du moins la vocale, n’a été jusqu’ici du goût
d’aucune autre nation. Elle ne pouvait l’être, parceque la prosodie
française est différente de toutes celles de l’Europe. Nous appuyons
toujours sur la dernière syllabe, et toutes les autres nations pèsent
sur la pénultième ou sur l’antépénultième, ainsi que les Italiens.
Notre langue est la seule qui ait des mots terminés par des _e_ muets,
et ces _e_, qui ne sont pas prononcés dans la déclamation ordinaire,
le sont dans la déclamation notée, et le sont d’une manière uniforme
_gloi-reu_, _victoi-reu_, _barbari-eu_, _furi-eu_.... Voilà ce qui rend
la plupart de nos airs et notre récitatif insupportables à quiconque
n’y est pas accoutumé. Le climat refuse encore aux voix la légèreté
que donne celui d’Italie; nous n’avons point l’habitude qu’on a eue
long-temps chez le pape et dans les autres cours italiennes, de priver
les hommes de leur virilité pour leur donner une voix plus belle que
celle des femmes. Tout cela, joint à la lenteur de notre chant, qui
fait un étrange contraste avec la vivacité de notre nation, rendra
toujours la musique française propre pour les seuls Français.
Malgré toutes ces raisons, les étrangers qui ont été long-temps en
France conviennent que nos musiciens ont fait des chefs-d’œuvre en
ajustant leurs airs à nos paroles, et que cette déclamation notée
a souvent une expression admirable; mais elle ne l’a que pour des
oreilles très accoutumées, et il faut une exécution parfaite. Il faut
des acteurs: en Italie, il ne faut que des chanteurs.
La musique instrumentale s’est ressentie un peu de la monotonie
et de la lenteur qu’on reproche à la vocale; mais plusieurs de
nos symphonies, et surtout nos airs de danse, ont trouvé plus
d’applaudissements chez les autres nations. On les exécute dans
beaucoup d’opéra italiens; il n’y en a presque jamais d’autres chez un
roi[340] qui entretient un des meilleurs Opéra de l’Europe, et qui,
parmi ses autres talents singuliers, a cultivé avec un très grand soin
celui de la musique.
LULLI (Jean-Baptiste), né à Florence, en 1633, amené en France à l’âge
de quatorze ans, et ne sachant encore que jouer du violon, fut le père
de la vraie musique en France. Il sut accommoder son art au génie de la
langue; c’est l’unique moyen de réussir. Il est à remarquer qu’alors
la musique italienne ne s’éloignait pas de la gravité et de la noble
simplicité que nous admirons encore dans les récitatifs de Lulli.
Rien ne ressemble plus à ces récitatifs que le fameux motet de Luigi,
chanté en Italie avec tant de succès dans le dix-septième siècle, et
qui commence ainsi:
«Sunt breves mundi rosæ,
Sunt fugitivi flores;
Frondes veluti annosæ
Sunt labiles honores.»
Il faut bien observer que dans cette musique de pure déclamation, qui
est la _mélopée_ des anciens, c’est principalement la beauté naturelle
des paroles qui produit la beauté du chant; on ne peut bien déclamer
que ce qui mérite de l’être. C’est à quoi on se méprit beaucoup du
temps de Quinault et de Lulli. Les poëtes étaient jaloux du poëte, et
ne l’étaient pas du musicien. Boileau reproche à Quinault
...... ces lieux communs de morale lubrique,
Que Lulli réchauffa des sons de sa musique.
Les passions tendres, que Quinault exprimait si bien, étaient,
sous sa plume, la peinture vraie du cœur humain bien plus qu’une
morale lubrique. Quinault, par sa diction, échauffait encore plus la
musique que l’art de Lulli n’échauffait ses paroles. Il fallait ces
deux hommes et des acteurs pour faire de quelques scènes d’_Atys_,
d’_Armide_, et de _Roland_, un spectacle tel que ni l’antiquité
ni aucun peuple contemporain n’en connut. Les airs détachés, les
ariettes, ne répondirent pas à la perfection de ces grandes scènes.
Ces airs, ces petites chansons, étaient dans le goût de nos _Noëls_;
ils ressemblaient aux _barcarolles_ de Venise: c’était tout ce qu’on
voulait alors. Plus cette musique était faible, plus on la retenait
aisément; mais le récitatif est si beau, que Rameau n’a jamais pu
l’égaler. Il me faut des chanteurs, disait-il, et à Lulli des acteurs.
Rameau a enchanté les oreilles, Lulli enchantait l’ame; c’est un des
grands avantages du siècle de Louis XIV, que Lulli ait rencontré un
Quinault.
Après Lulli, tous les musiciens, comme Colasse, Campra,
Destouches[341] et les autres, ont été ses imitateurs, jusqu’à ce
qu’enfin Rameau est venu, qui s’est élevé au-dessus d’eux par la
profondeur de son harmonie, et qui a fait de la musique un art nouveau.
A l’égard des musiciens de chapelle, quoiqu’il y en ait plusieurs
célèbres en France, leurs ouvrages n’ont point encore été exécutés
ailleurs.

PEINTRES.
Il n’en est pas de la peinture comme de la musique. Une nation peut
avoir un chant qui ne plaise qu’à elle, parceque le génie de sa langue
n’en admettra pas d’autres; mais les peintres doivent représenter la
nature, qui est la même dans tous les pays, et qui est vue avec les
mêmes yeux.
Il faut, pour qu’un peintre ait une juste réputation, que ses ouvrages
aient un prix chez les étrangers. Ce n’est pas assez d’avoir un petit
parti, et d’être loué dans de petits livres; il faut être acheté.
Ce qui resserre quelquefois les talents des peintres est ce qui
semblerait devoir les étendre; c’est le goût académique; c’est la
manière qu’ils prennent d’après ceux qui président. Les académies sont,
sans doute, très utiles pour former des élèves, surtout quand les
directeurs travaillent dans le grand goût: mais, si le chef a le goût
petit, si sa manière est aride et léchée, si ses figures grimacent, si
ses tableaux sont peints comme les éventails; les élèves, subjugués
par l’imitation ou par l’envie de plaire à un mauvais maître, perdent
entièrement l’idée de la belle nature. Il y a une fatalité sur les
académies: aucun ouvrage qu’on appelle académique n’a été encore, en
aucun genre, un ouvrage de génie. Donnez-moi un artiste tout occupé
de la crainte de ne pas saisir la manière de ses confrères, ses
productions seront compassées et contraintes. Donnez-moi un homme d’un
esprit libre, plein de la nature qu’il copie, il réussira. Presque
tous les artistes sublimes, ou ont fleuri avant les établissements des
académies, ou ont travaillé dans un goût différent de celui qui régnait
dans ces sociétés.
Corneille, Racine, Despréaux, Lesueur, Lemoine, non seulement prirent
une route différente de leurs confrères, mais ils les avaient presque
tous pour ennemis.
POUSSIN (Nicolas), né aux Andelis, en Normandie, en 1594, fut l’élève
de son génie; il se perfectionna à Rome. On l’appelle le peintre des
gens d’esprit; on pourrait aussi l’appeler celui des gens de goût. Il
n’a d’autre défaut que celui d’avoir outré le sombre du coloris de
l’école romaine. Il était, dans son temps, le plus grand peintre de
l’Europe. Rappelé de Rome à Paris, il y céda à l’envie et aux cabales;
il se retira: c’est ce qui est arrivé à plus d’un artiste. Le Poussin
retourna à Rome, où il vécut pauvre, mais content. Sa philosophie le
mit au-dessus de la fortune. Mort en 1665.
LESUEUR (Eustache), né a Paris, en 1617, n’ayant eu que Vouët pour
maître, devint cependant un peintre excellent. Il avait porté l’art
de la peinture au plus haut point, lorsqu’il mourut, à l’âge de
trente-huit ans, en 1655.
BOURDON et le VALENTIN[342] ont été célèbres. Trois des meilleurs
tableaux qui ornent l’église de Saint-Pierre de Rome sont du Poussin,
du Bourdon, et du Valentin.
LEBRUN (Charles), né à Paris, en 1619. A peine eut-il développé son
talent, que le surintendant Fouquet, l’un des plus généreux et des
plus malheureux hommes qui aient jamais été, lui donna une pension
de vingt-quatre mille livres de notre monnaie d’aujourd’hui. Il est
à remarquer que son tableau de _la Famille de Darius_, qui est à
Versailles, n’est point effacé par le coloris du tableau de Paul
Véronèse, qu’on voit à côté, et le surpasse beaucoup par le dessin, la
composition, la dignité, l’expression, et la fidélité du costume. Les
estampes de ses tableaux des _batailles d’Alexandre_ sont encore plus
recherchées que les _batailles de Constantin_, par Raphaël et par Jules
Romain. Mort en 1690.
MIGNARD (Pierre), né à Troyes en Champagne, en 1610, fut le rival de
Lebrun pendant quelque temps; mais il ne l’est pas aux yeux de la
postérité. Mort en 1695.
GELÉE (Claude), dit LE LORRAIN. Son père, qui en voulait faire
un garçon pâtissier, ne prévoyait pas qu’un jour son fils ferait
des tableaux qui seraient regardés comme ceux d’un des premiers
paysagistes de l’Europe. Mort à Rome, en 1678.
CAZES[343] (Pierre-Jacques). On a de lui des tableaux qui commencent
à être d’un grand prix. On rend trop tard justice, en France, aux
bons artistes. Leurs ouvrages médiocres y font trop de tort à leurs
chefs-d’œuvre. Les Italiens, au contraire, passent chez eux le médiocre
en faveur de l’excellent. Chaque nation cherche à se faire valoir. Les
Français font valoir les autres nations en tout genre.
PARROCEL (Joseph), né en 1648, bon peintre, et surpassé par son fils.
Mort en 1704.
JOUVENET (Jean), né à Rouen en 1644[344], élève de Lebrun, inférieur
à son maître, quoique bon peintre. Il a peint presque tous les objets
d’une couleur un peu jaune. Il les voyait de cette couleur par une
singulière conformation d’organes. Devenu paralytique du bras droit,
il s’exerça à peindre de la main gauche, et on a de lui de grandes
compositions exécutées de cette manière. Mort en 1717.
SANTERRE (Jean-Baptiste). Il y a de lui des tableaux de chevalet
admirables, d’un coloris vrai et tendre. Son tableau d’Adam et d’Ève
est un des plus beaux qu’il y ait en Europe. Celui de sainte Thérèse,
dans la chapelle de Versailles, est un chef-d’œuvre de graces; et on ne
lui a reproché que d’être trop voluptueux pour un tableau d’autel. Né
en 1651. Mort en 1717.
LA FOSSE[345] (Charles de) s’est distingué par un mérite à peu près
semblable.
BOULLONGNE[346] (Bon), excellent peintre; la preuve en est que ses
tableaux sont vendus fort cher.
BOULLONGNE[347] (Louis). Ses tableaux, qui ne sont pas sans mérite,
sont moins recherchés que ceux de son frère.
RAOUX[348], peintre inégal; mais, quand il a réussi, il a égalé le
Rembrandt.
RIGAUD (Hyacinthe), né à Perpignan en 1663. Quoiqu’il n’ait guère de
réputation que dans le portrait, le grand tableau où il a représenté le
cardinal de Bouillon ouvrant l’année sainte, est un chef-d’œuvre égal
aux plus beaux ouvrages de Rubens. Mort en 1743.
DETROY[349] (François) a travaillé dans le goût de Rigaud. On a de son
fils des tableaux d’histoire estimés.
WATTEAU[350] (Antoine) a été dans le gracieux à peu près ce que Téniers
a été dans le grotesque. Il a fait des disciples dont les tableaux sont
recherchés.
LEMOINE, né à Paris en 1688, a peut-être surpassé tous ces peintres
par la composition du _salon d’Hercule_, à Versailles. Cette apothéose
d’Hercule était une flatterie pour le cardinal Hercule de Fleury, qui
n’avait rien de commun avec l’Hercule de la fable. Il eût mieux valu,
dans le salon d’un roi de France, représenter l’apothéose de Henri
IV. Lemoine, envié de ses confrères, et se croyant mal récompensé du
cardinal, se tua de désespoir en 1737.
Quelques autres ont excellé à peindre des animaux, comme DESPORTES et
OUDRY[351]; d’autres ont réussi dans la miniature; plusieurs dans le
portrait. Quelques peintres, et surtout le célèbre VANLOO[352], se sont
distingués depuis dans de plus grands genres; et il est à croire que
cet art ne périra pas.

SCULPTEURS, ARCHITECTES, GRAVEURS, ETC.
La sculpture a été poussée à sa perfection sous Louis XIV, et s’est
soutenue dans sa force sous Louis XV.
SARASIN (Jacques), né en 1598, fit des chefs-d’œuvre à Rome pour le
pape Clément VIII. Il travailla à Paris avec le même succès. Mort en
1660.
PUGET (Pierre), né à Marseille en 1623, architecte, sculpteur, et
peintre; célèbre par plusieurs chefs-d’œuvre qu’on voit à Marseille et
à Versailles. Mort en 1694.
LEGROS et THÉODON[353] ont embelli l’Italie de leurs ouvrages. Ils
firent chacun, à Rome, deux modèles qui l’emportèrent au concours sur
tous les autres, et qui sont comptés parmi les chefs-d’œuvre. Legros
mourut à Rome en 1719.
GIRARDON (François), né en 1630, a égalé tout ce que l’antiquité a de
plus beau, par les bains d’_Apollon_, et par le tombeau du cardinal de
Richelieu. Mort en 1715[354].
Les COISEVOX[355] et les COUSTOU[356], et beaucoup d’autres, se sont
très distingués, et sont encore surpassés aujourd’hui par quatre ou
cinq de nos sculpteurs modernes.
CHAUVEAU[357], NANTEUIL[358], MELLAN[359], AUDRAN[360], EDELINCK[361],
LE CLERC[362], les DREVET[363], POILLY[364], PICART[365],
DUCHANGE[366], suivis encore par de meilleurs artistes, ont réussi
dans les tailles-douces; et leurs estampes ornent, dans l’Europe, les
cabinets de ceux qui ne peuvent avoir des tableaux.
De simples orfèvres, tels que Claude BALLIN et Pierre GERMAIN[367], ont
mérité d’être mis au rang des plus célèbres artistes, par la beauté de
leur dessin et par l’élégance de leur exécution.
Il n’est pas aussi facile à un génie né avec le bon goût de
l’architecture de faire valoir ses talents, qu’à tout autre artiste. Il
ne peut élever de grands monuments que quand des princes les ordonnent.
Plus d’un bon architecte a eu des talents inutiles.
MANSARD[368] (François) a été un des meilleurs architectes de l’Europe.
Le château ou plutôt le palais de Maisons, auprès de Saint-Germain, est
un chef-d’œuvre, parcequ’il eut la liberté entière de se livrer à son
génie.
MANSARD[369] (Jules Hardouin), son neveu, mort en 1708, fit une fortune
immense sous Louis XIV, et fut surintendant des bâtiments. La belle
chapelle des Invalides est de lui. Il ne put déployer tous ses talents
dans celle de Versailles, où il fut gêné par le terrain et par la
disposition du petit château qu’il fallut conserver.
On reproche à la ville de Paris de n’avoir que deux fontaines dans le
bon goût; l’ancienne, de Jean Goujon; et la nouvelle, de Bouchardon:
encore sont-elles toutes deux mal placées[370]. On lui reproche de
n’avoir d’autre théâtre magnifique que celui du Louvre, dont on ne fait
point d’usage, et de ne s’assembler que dans des salles de spectacle
sans goût, sans proportion, sans ornement, et aussi défectueuses dans
l’emplacement que dans la construction; tandis que les villes de
provinces donnent à la capitale des exemples quelle n’a pas encore
suivis[371].
La France a été distinguée par d’autres ouvrages publics d’une plus
grande importance: ce sont les vastes hôpitaux, les magasins, les
ponts de pierre, les quais, les immenses levées qui retiennent les
rivières dans leur lit, les canaux, les écluses, les ports, et surtout
l’architecture militaire de tant de places frontières, où la solidité
se joint à la beauté. On connaît assez les ouvrages élevés sur les
dessins de PERRAULT, de LEVAU, et de DORBAY[372].
L’art des jardins a été créé et perfectionné par LE NOSTRE pour
l’agréable, et par LA QUINTINIE pour l’utile. Il n’est pas vrai que Le
Nostre ait poussé la simplicité jusqu’à embrasser familièrement le roi
et le pape[373]. Son élève Collineau m’a protesté que ces historiettes,
rapportées dans tant de dictionnaires, sont fausses; et on n’a pas
besoin de ce témoignage pour savoir qu’un intendant des jardins ne
baise point les papes et les rois des deux côtés.
La gravure en pierres précieuses, les coins des médailles, les fontes
des caractères pour l’imprimerie, tout cela s’est ressenti des progrès
rapides des autres arts.
Les horlogers, qu’on peut regarder comme des physiciens de pratique,
ont fait admirer leur esprit dans leur travail.
On a nuancé les étoffes, et même l’or qui les embellit, avec une
intelligence et un goût si rare, que telle étoffe, qui n’a été
portée que par le luxe, méritait d’être conservée comme un monument
d’industrie.
Enfin le siècle passé a mis celui où nous sommes en état de rassembler
en un corps, et de transmettre à la postérité le dépôt de toutes les
sciences et de tous les arts, tous poussés aussi loin que l’industrie
humaine a pu aller; et c’est à quoi a travaillé une société de savants
remplis d’esprit et de lumières. Cet ouvrage immense et immortel semble
accuser la brièveté de la vie des hommes[374]. Il a été commencé par
messieurs d’Alembert et Diderot, traversé et persécuté par l’envie
et par l’ignorance, ce qui est le destin de toutes les grandes
entreprises. Il eût été à souhaiter que quelques mains étrangères
n’eussent pas défiguré cet important ouvrage par des déclamations
puériles et des lieux communs insipides, qui n’empêchent pas que le
reste de l’ouvrage ne soit utile au genre humain.


SIÈCLE
DE LOUIS XIV.


CHAPITRE I.
Introduction[375].

Ce n’est pas seulement la vie de Louis XIV qu’on prétend écrire; on se
propose un plus grand objet. On veut essayer de peindre à la postérité,
non les actions d’un seul homme, mais l’esprit des hommes dans le
siècle le plus éclairé qui fut jamais.
Tous les temps ont produit des héros et des politiques: tous les
peuples ont éprouvé des révolutions: toutes les histoires sont presque
égales pour qui ne veut mettre que des faits dans sa mémoire. Mais
quiconque pense, et, ce qui est encore plus rare, quiconque a du goût,
ne compte que quatre siècles dans l’histoire du monde. Ces quatre
âges heureux sont ceux où les arts ont été perfectionnés, et qui,
servant d’époque à la grandeur de l’esprit humain, sont l’exemple de la
postérité.
Le premier de ces siècles, à qui la véritable gloire est attachée,
est celui de Philippe et d’Alexandre, ou celui des Périclès, des
Démosthène, des Aristote, des Platon, des Apelle, des Phidias, des
Praxitèle; et cet honneur a été renfermé dans les limites de la Grèce;
le reste de la terre alors connue était barbare.
Le second âge est celui de César et d’Auguste, désigné encore par
les noms de Lucrèce, de Cicéron, de Tite-Live, de Virgile, d’Horace,
d’Ovide, de Varron, de Vitruve.
Le troisième est celui qui suivit la prise de Constantinople par
Mahomet II. Le lecteur peut se souvenir qu’on vit alors en Italie une
famille de simples citoyens faire ce que devaient entreprendre les
rois de l’Europe. Les Médicis appelèrent à Florence les savants, que
les Turcs chassaient de la Grèce: c’était le temps de la gloire de
l’Italie. Les beaux-arts y avaient déjà repris une vie nouvelle; les
Italiens les honorèrent du nom de vertu, comme les premiers Grecs les
avaient caractérisés du nom de sagesse. Tout tendait à la perfection.
Les arts, toujours transplantés de Grèce en Italie, se trouvaient dans
un terrain favorable, où ils fructifiaient tout-à-coup. La France,
l’Angleterre, l’Allemagne, l’Espagne, voulurent à leur tour avoir de
ces fruits: mais ou ils ne vinrent point dans ces climats, ou bien ils
dégénérèrent trop vite.
François Iᵉʳ encouragea des savants, mais qui ne furent que savants: il
eut des architectes; mais il n’eut ni des Michel-Ange, ni des Palladio:
il voulut en vain établir des écoles de peinture; les peintres italiens
qu’il appela ne firent point d’élèves français. Quelques épigrammes et
quelques contes libres composaient toute notre poésie. Rabelais était
notre seul livre de prose à la mode, du temps de Henri II.
En un mot, les Italiens seuls avaient tout, si vous en exceptez la
musique, qui n’était pas encore perfectionnée, et la philosophie
expérimentale, inconnue partout également, et qu’enfin Galilée fit
connaître.
Le quatrième siècle est celui qu’on nomme le siècle de Louis XIV; et
c’est peut-être celui des quatre qui approche le plus de la perfection.
Enrichi des découvertes des trois autres, il a plus fait en certains
genres que les trois ensemble. Tous les arts, à la vérité, n’ont point
été poussés plus loin que sous les Médicis, sous les Auguste et les
Alexandre; mais la raison humaine en général s’est perfectionnée.
La saine philosophie n’a été connue que dans ce temps; et il est
vrai de dire qu’à commencer depuis les dernières années du cardinal
de Richelieu, jusqu’à celles qui ont suivi la mort de Louis XIV, il
s’est fait dans nos arts, dans nos esprits, dans nos mœurs, comme
dans notre gouvernement, une révolution générale qui doit servir de
marque éternelle à la véritable gloire de notre patrie. Cette heureuse
influence ne s’est pas même arrêtée en France; elle s’est étendue en
Angleterre; elle a excité l’émulation dont avait alors besoin cette
nation spirituelle et hardie; elle a porté le goût en Allemagne, les
sciences en Russie; elle a même ranimé l’Italie qui languissait, et
l’Europe a dû sa politesse et l’esprit de société à la cour de Louis
XIV.
Il ne faut pas croire que ces quatre siècles aient été exempts de
malheurs et de crimes. La perfection des arts cultivés par des citoyens
paisibles n’empêche pas les princes d’être ambitieux; les peuples
d’être séditieux, les prêtres et les moines d’être quelquefois
remuants et fourbes. Tous les siècles se ressemblent par la méchanceté
des hommes; mais je ne connais que ces quatre âges distingués par les
grands talents.
Avant le siècle que j’appelle de Louis XIV, et qui commence à peu
près à l’établissement de l’académie française[376], les Italiens
appelaient tous les ultramontains du nom de barbares; il faut avouer
que les Français méritaient en quelque sorte cette injure. Leurs
pères joignaient la galanterie romanesque des Maures à la grossièreté
gothique. Ils n’avaient presque aucun des arts aimables, ce qui prouve
que les arts utiles étaient négligés; car lorsqu’on a perfectionné
ce qui est nécessaire, on trouve bientôt le beau et l’agréable; et
il n’est pas étonnant que la peinture, la sculpture, la poésie,
l’éloquence, la philosophie, fussent presque inconnues à une nation
qui, ayant des ports sur l’Océan et sur la Méditerranée, n’avait
pourtant point de flotte, et qui, aimant le luxe à l’excès, avait à
peine quelques manufactures grossières.
Les Juifs, les Génois, les Vénitiens, les Portugais, les Flamands,
les Hollandais, les Anglais, firent tour-à-tour le commerce de la
France, qui en ignorait les principes. Louis XIII, à son avènement à
la couronne, n’avait pas un vaisseau: Paris ne contenait pas quatre
cent mille hommes, et n’était pas décoré de quatre beaux édifices; les
autres villes du royaume ressemblaient à ces bourgs qu’on voit au-delà
de la Loire. Toute la noblesse, cantonnée à la campagne dans des
donjons entourés de fossés, opprimait ceux qui cultivent la terre. Les
grands chemins étaient presque impraticables; les villes étaient sans
police, l’état sans argent, et le gouvernement presque toujours sans
crédit parmi les nations étrangères.
On ne doit pas se dissimuler que, depuis la décadence de la famille de
Charlemagne, la France avait langui plus ou moins dans cette faiblesse,
parcequ’elle n’avait presque jamais joui d’un bon gouvernement.
Il faut, pour qu’un état soit puissant, ou que le peuple ait une
liberté fondée sur les lois, ou que l’autorité souveraine soit affermie
sans contradiction. En France, les peuples furent esclaves jusque vers
le temps de Philippe-Auguste; les seigneurs furent tyrans jusqu’à Louis
XI; et les rois, toujours occupés à soutenir leur autorité contre leurs
vassaux, n’eurent jamais ni le temps de songer au bonheur de leurs
sujets, ni le pouvoir de les rendre heureux.
Louis XI fit beaucoup pour la puissance royale, mais rien pour la
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