Actes et Paroles, Volume 1 - 12

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assemblees. (_Oui! oui!_)
Les minorites trouvent dans la presse libre l'appui qui leur est
souvent refuse dans les deliberations interieures. Pour prouver ce que
j'avance, les raisonnements abondent, les faits abondent egalement.
(_Bruit_.)
VOIX A GAUCHE.--Attendez le silence! C'est un parti pris!
M. VICTOR HUGO.--Je dis que les minorites trouvent dans la presse
libre ...--et, messieurs, permettez-moi de vous rappeler que toute
majorite peut devenir minorite, ainsi respectons les minorites (_vive
adhesion_);--les minorites trouvent dans la presse libre l'appui qui
leur manque souvent dans les deliberations interieures. Et voulez-vous
un fait? Je vais vous en citer un qui est certainement dans la memoire
de beaucoup d'entre vous.
Sous la restauration, un jour, un orateur energique de la gauche,
Casimir Perier, osa jeter a la chambre des deputes cette parole
hardie: Nous sommes six dans cette enceinte et trente millions au
dehors. (_Mouvement_.)
Messieurs, ces paroles memorables, ces paroles qui contenaient
l'avenir, furent couvertes, au moment ou l'orateur les prononca,
par les murmures de la chambre entiere, et le lendemain par les
acclamations de la presse unanime. (_Tres bien! tres bien! Mouvement
prolonge_.)
Eh bien, voulez-vous savoir ce que la presse libre a fait pour
l'orateur libre? (_Ecoutez!_) Ouvrez les lettres politiques de
Benjamin Constant, vous y trouverez ce passage remarquable:
"En revenant a son banc, le lendemain du jour ou il avait parle ainsi,
Casimir Perier me dit: "Si l'unanimite de la presse n'avait pas fait
contre-poids a l'unanimite de la chambre, j'aurais peut-etre ete
decourage."
Voila ce que peut la liberte de la presse, voila l'appui qu'elle peut
donner! c'est peut-etre a la liberte de la presse que vous avez du cet
homme courageux qui, le jour ou il le fallut, sut etre bon serviteur
de l'ordre parce qu'il avait ete bon serviteur de la liberte.
Ne souffrez pas les empietements du pouvoir; ne laissez pas se faire
autour de vous cette espece de calme faux qui n'est pas le calme, que
vous prenez pour l'ordre et qui n'est pas l'ordre; faites attention
a cette verite que Cromwell n'ignorait pas, et que Bonaparte savait
aussi: Le silence autour des assemblees, c'est bientot le silence dans
les assemblees. (_Mouvement_.)
Encore un mot.
Quelle etait la situation de la presse a l'epoque de la terreur?...
(_Interruption_.)
Il faut bien que je vous rappelle des analogies, non dans les epoques,
mais dans la situation de la presse. La presse alors etait, comme
aujourd'hui, libre de droit, esclave de fait. Alors, pour faire taire
la presse, on menacait de mort les journalistes; aujourd'hui on menace
de mort les journaux. (_Mouvement_.) Le moyen est moins terrible, mais
il n'est pas moins efficace.
Qu'est-ce que c'est que cette situation? c'est la censure.
(_Agitation_.) C'est la censure, c'est la pire, c'est la plus
miserable de toutes les censures; c'est celle qui attaque l'ecrivain
dans ce qu'il a de plus precieux au monde, dans sa dignite meme; celle
qui livre l'ecrivain aux tatonnements, sans le mettre a l'abri des
coups d'etat. (_Agitation croissante_.) Voila la situation dans
laquelle vous placez la presse aujourd'hui.
M. FLOCON.--Je demande la parole.
M. VICTOR HUGO.--Eh quoi! messieurs, vous raturez la censure dans
votre constitution et vous la maintenez dans votre gouvernement! A une
epoque comme celle ou nous sommes, ou il y a tant d'indecision dans
les esprits.... (_Bruit_.)
LE PRESIDENT.--Il s'agit d'une des libertes les plus cheres au pays;
je reclame pour l'orateur le silence et l'attention de l'assemblee.
(_Tres bien! tres bien!_)
M. VICTOR HUGO.--Je fais remarquer aux honorables membres qui
m'interrompent en ce moment qu'ils outragent deux libertes a la fois,
la liberte de la presse, que je defends, et la liberte de la tribune,
que j'invoque.
Comment! il n'est pas permis de vous faire remarquer qu'au moment ou
vous venez de declarer que la censure etait abolie, vous la maintenez!
(_Bruit. Parlez! parlez!_) Il n'est pas permis de vous faire remarquer
qu'au moment ou le peuple attend des solutions, vous lui donnez des
contradictions! Savez-vous ce que c'est que les contradictions en
politique? Les contradictions sont la source des malentendus, et les
malentendus sont la source des catastrophes. (_Mouvement_.)
Ce qu'il faut en ce moment aux esprits divises, incertains de tout,
inquiets de tout, ce ne sont pas des hypocrisies, des mensonges, de
faux semblants politiques, la liberte dans les theories, la censure
dans la pratique; non, ce qu'il faut a tous dans ce doute et dans
cette ombre ou sont les consciences, c'est un grand exemple en haut,
c'est dans le gouvernement, dans l'assemblee nationale, la grande et
fiere pratique de la justice et de la verite! (_Agitation prolongee_.)
M. le ministre de la justice invoquait tout a l'heure la necessite.
Je prends la liberte de lui faire observer que la necessite est
l'argument des mauvaises politiques; que, dans tous les temps, sous
tous les regimes, les hommes d'etat, condamnes par une insuffisance,
qui ne venait pas d'eux quelquefois, qui venait des circonstances
memes, se sont appuyes sur cet argument de la necessite. Nous avons vu
deja, et souvent, sous le regime anterieur, les gouvernants recourir
a l'arbitraire, au despotisme, aux suspensions de journaux, aux
incarcerations d'ecrivains. Messieurs, prenez garde! vous faites
respirer a la republique le meme air qu'a la monarchie. Souvenez-vous
que la monarchie en est morte. (_Mouvement_.)
Messieurs, je ne dirai plus qu'un mot.... (_Interruption_.)
L'assemblee me rendra cette justice que des interruptions
systematiques ne m'ont pas empeche de protester jusqu'au bout en
faveur de la liberte de la presse.
Messieurs, des temps inconnus s'approchent; preparons-nous a les
recevoir avec toutes les ressources reunies de l'etat, du peuple,
de l'intelligence, de la civilisation francaise, et de la bonne
conscience des gouvernants. Toutes les libertes sont des forces; ne
nous laissons pas plus depouiller de nos libertes que nous ne nous
laisserions depouiller de nos armes la veille du combat.
Prenons garde aux exemples que nous donnons! Les exemples que
nous donnons sont inevitablement, plus tard, nos ennemis ou nos
auxiliaires; au jour du danger, ils se levent et ils combattent pour
nous ou contre nous.
Quant a moi, si le secret de mes votes valait la peine d'etre
explique, je vous dirais: J'ai vote l'autre jour contre la peine de
mort; je vote aujourd'hui pour la liberte.
Pourquoi? C'est que je ne veux pas revoir 93! c'est qu'en 93 il y
avait l'echafaud, et il n'y avait pas la liberte.
J'ai toujours ete, sous tous les regimes, pour la liberte, contre la
compression. Pourquoi? C'est que la liberte reglee par la loi produit
l'ordre, et que la compression produit l'explosion. Voila pourquoi je
ne veux pas de la compression et je veux de la liberte. (_Mouvement.
Longue agitation_).

VI
QUESTION DES ENCOURAGEMENTS AUX LETTRES ET AUX ARTS
10 novembre 1848.
M. LE PRESIDENT.--L'ordre du jour appelle la discussion du budget
rectifie de 1848.
M. VICTOR HUGO.--Personne plus que moi, messieurs (_Plus haut! plus
haut!_), n'est penetre de la necessite, de l'urgente necessite
d'alleger le budget; seulement, a mon avis, le remede a l'embarras
de nos finances n'est pas dans quelques economies chetives et
detestables; ce remede serait, selon moi, plus haut et ailleurs; il
serait dans une politique intelligente et rassurante, qui donnerait
confiance a la France, qui ferait renaitre l'ordre, le travail et le
credit ... (_agitation_) et qui permettrait de diminuer, de supprimer
meme les enormes depenses speciales qui resultent des embarras de la
situation. C'est la, messieurs, la veritable surcharge du budget,
surcharge qui, si elle se prolongeait et s'aggravait encore, et si
vous n'y preniez garde, pourrait, dans un temps donne, faire crouler
l'edifice social.
Ces reserves faites, je partage, sur beaucoup de points, l'avis de
votre comite des finances.
J'ai deja vote, et je continuerai de voter la plupart des reductions
proposees, a l'exception de celles qui me paraitraient tarir les
sources memes de la vie publique, et de celles qui, a cote d'une
amelioration financiere douteuse, me presenteraient une faute
politique certaine.
C'est dans cette derniere categorie que je range les reductions
proposees par le comite des finances sur ce que j'appellerai le budget
special des lettres, des sciences et des arts.
Ce budget devrait, pour toutes les raisons ensemble, etre reuni dans
une seule administration et tenu dans une seule main. C'est un vice de
notre classification administrative que ce budget soit reparti
entre deux ministeres, le ministere de l'instruction publique et le
ministere de l'interieur.
Ceci m'obligera, dans le peu que j'ai a dire, d'effleurer quelquefois
le ministere de l'interieur. Je pense que l'assemblee voudra bien me
le permettre, pour la clarte meme de la demonstration. Je le ferai, du
reste, avec une extreme reserve.
Je dis, messieurs, que les reductions proposees sur le budget special
des sciences, des lettres et des arts sont mauvaises doublement. Elles
sont insignifiantes au point de vue financier, et nuisibles a tous les
autres points de vue.
Insignifiantes au point de vue financier. Cela est d'une telle
evidence, que c'est a peine si j'ose mettre sous les yeux de
l'assemblee le resultat d'un calcul de proportion que j'ai fait. Je
ne voudrais pas eveiller le rire de l'assemblee dans une question
serieuse; cependant, il m'est impossible de ne pas lui soumettre
une comparaison bien triviale, bien vulgaire, mais qui a le merite
d'eclairer la question et de la rendre pour ainsi dire visible et
palpable.
Que penseriez-vous, messieurs, d'un particulier qui aurait 1,500
francs de revenu, qui consacrerait tous les ans a sa culture
intellectuelle, pour les sciences, les lettres et les arts, une somme
bien modeste, 5 francs, et qui, dans un jour de reforme, voudrait
economiser sur son intelligence six sous? (_Rire approbatif_.)
Voila, messieurs, la mesure exacte de l'economie proposee. (_Nouveau
rire_.) Eh bien! ce que vous ne conseilleriez pas a un particulier, au
dernier des habitants d'un pays civilise, on ose le conseiller a la
France. (_Mouvement_.)
Je viens de vous montrer a quel point l'economie serait petite; je
vais vous montrer maintenant combien le ravage serait grand.
Pour vous edifier sur ce point, je ne sache rien de plus eloquent
que la simple nomenclature des institutions, des etablissements, des
interets que les reductions proposees atteignent dans le present et
menacent dans l'avenir.
J'ai dresse cette nomenclature; je demande a l'assemblee la permission
de la lui lire, cela me dispensera de beaucoup de developpements. Les
reductions proposees atteignent:
Le college de France,
Le museum,
Les bibliotheques,
L'ecole des chartes,
L'ecole des langues orientales,
La conservation des archives nationales,
La surveillance de la librairie a l'etranger ... (Ruine
complete de notre librairie, le champ livre a la contrefacon!)
L'ecole de Rome,
L'ecole des beaux-arts de Paris,
L'ecole de dessin de Dijon,
Le conservatoire,
Les succursales de province,
Les musees des Thermes et de Cluny,
Nos musees de peinture et de sculpture,
La conservation des monuments historiques.
Les reformes menacent pour l'annee prochaine:
Les facultes des sciences et des lettres,
Les souscriptions aux livres,
Les subventions aux societes savantes,
Les encouragements aux beaux-arts.
En outre,--ceci touche au ministere de l'interieur, mais la chambre
me permettra de le dire, pour que le tableau soit complet,--les
reductions atteignent des a present et menacent pour l'an prochain les
theatres. Je ne veux vous en dire qu'un mot en passant. On propose la
suppression d'un commissaire sur deux; j'aimerais mieux la suppression
d'un censeur et meme de deux censeurs. (_On rit_.)
UN MEMBRE.--Il n'y a plus de censure!
UN MEMBRE, a gauche.--Elle sera bientot retablie!
M. VICTOR HUGO.--Enfin le rapport reserve ses plus dures paroles
et ses menaces les plus serieuses pour les indemnites et secours
litteraires. Oh! voila de monstrueux abus! Savez-vous, messieurs,
ce que c'est que les indemnites et les secours litteraires? C'est
l'existence de quelques familles pauvres entre les plus pauvres,
honorables entre les plus honorables.
Si vous adoptiez les reductions proposees, savez-vous ce qu'on
pourrait dire? On pourrait dire: Un artiste, un poete, un ecrivain
celebre travaille toute sa vie, il travaille sans songer a s'enrichir,
il meurt, il laisse a son pays beaucoup de gloire a la seule condition
de donner a sa veuve et a ses enfants un peu de pain. Le pays garde la
gloire et refuse le pain. (_Sensation_.)
Voila ce qu'on pourrait dire, et voila ce qu'on ne dira pas; car,
a coup sur, vous n'entrerez pas dans ce systeme d'economies qui
consternerait l'intelligence et qui humilierait la nation. (_C'est
vrai!_)
Vous le voyez, ce systeme, comme vous le disait si bien notre
honorable collegue M. Charles Dupin, ce systeme attaque tout; ce
systeme ne respecte rien, ni les institutions anciennes, ni les
institutions modernes; pas plus les fondations liberales de Francois
Ier que les fondations liberales de la Convention. Ce systeme
d'economies ebranle d'un seul coup tout cet ensemble d'institutions
civilisatrices qui est, pour ainsi dire, la base du developpement de
la pensee francaise.
Et quel moment choisit-on? C'est ici, a mon sens, la faute politique
grave que je vous signalais en commencant; quel moment choisit-on pour
mettre en question toutes ces institutions a la fois? Le moment ou
elles sont plus necessaires que jamais, le moment ou, loin de les
restreindre, il faudrait les etendre et les elargir.
Eh! quel est, en effet, j'en appelle a vos consciences, j'en appelle
a vos sentiments a tous, quel est le grand peril de la situation
actuelle? L'ignorance. L'ignorance encore plus que la misere.
(_Adhesion_.)
L'ignorance qui nous deborde, qui nous assiege, qui nous investit de
toutes parts. C'est a la faveur de l'ignorance que certaines doctrines
fatales passent de l'esprit impitoyable des theoriciens dans le
cerveau confus des multitudes. Le communisme n'est qu'une forme de
l'ignorance. Le jour ou l'ignorance disparaitrait, les sophismes
s'evanouiraient. Et c'est dans un pareil moment, devant un pareil
danger, qu'on songerait a attaquer, a mutiler, a ebranler toutes ces
institutions qui ont pour but special de poursuivre, de combattre, de
detruire l'ignorance!
Sur ce point, j'en appelle, je le repete, au sentiment de l'assemblee.
Quoi! d'un cote la barbarie dans la rue, et de l'autre le vandalisme
dans le gouvernement! (_Mouvement_.) Messieurs, il n'y a pas que
la prudence materielle au monde, il y a autre chose que ce que
j'appellerai la prudence brutale. Les precautions grossieres, les
moyens de police ne sont pas, Dieu merci, le dernier mot des societes
civilisees.
On pourvoit a l'eclairage des villes, on allume tous les soirs, et on
fait tres bien, des reverberes dans les carrefours, dans les places
publiques; quand donc comprendra-t-on que la nuit peut se faire aussi
dans le monde moral, et qu'il faut allumer des flambeaux pour les
esprits? (_Approbation et rires_.)
Puisque l'assemblee m'a interrompu, elle me permettra d'insister sur
ma pensee.
Oui, messieurs, j'y insiste. Un mal moral, un mal moral profond nous
travaille et nous tourmente. Ce mal moral, cela est etrange a dire,
n'est autre chose que l'exces des tendances materielles. Eh bien,
comment combattre le developpement des tendances materielles? Par le
developpement des tendances intellectuelles. Il faut oter au corps et
donner a l'ame. (_Oui! oui! Sensation_.)
Quand je dis: il faut oter au corps et donner a l'ame, vous ne vous
meprenez pas sur mon sentiment. (_Non! non!_) Vous me comprenez tous;
je souhaite passionnement, comme chacun de vous, l'amelioration du
sort materiel des classes souffrantes; c'est la, selon moi, le grand,
l'excellent progres auquel nous devons tous tendre de tous nos voeux
comme hommes et de tous nos efforts comme legislateurs.
Mais si je veux ardemment, passionnement, le pain de l'ouvrier, le
pain du travailleur, qui est mon frere, a cote du pain de la vie je
veux le pain de la pensee, qui est aussi le pain de la vie. Je veux
multiplier le pain de l'esprit comme le pain du corps. (_Interruption
au centre_.)
Il me semble, messieurs, que ce sont la les questions que souleve
naturellement ce budget de l'instruction publique discute en ce
moment. (_Oui! oui!_)
Eh bien, la grande erreur de notre temps, c'a ete de pencher, je dis
plus, de courber, l'esprit des hommes vers la recherche du bien-etre
materiel, et de le detourner par consequent du bien-etre religieux et
du bien-etre intellectuel. (_C'est vrai!_) La faute est d'autant plus
grande que le bien-etre materiel, quoi qu'on fasse, quand meme tous
les progres qu'on reve, et que je reve aussi, moi, seraient realises,
le bien-etre materiel ne peut et ne pourra jamais etre que le partage
de quelques-uns, tandis que le bien-etre religieux, c'est-a-dire la
croyance, le bien-etre intellectuel, c'est-a-dire l'education, peuvent
etre donnes a tous.
D'ailleurs le bien-etre materiel ne pourrait etre le but supreme de
l'homme en ce monde qu'autant qu'il n'y aurait pas d'autre vie, et
c'est la une affirmation desolante, c'est la un mensonge affreux qui
ne doit pas sortir des institutions sociales. (_Tres bien!--Mouvement
prolonge_.)
Il importe, messieurs, de remedier au mal; il faut redresser, pour
ainsi dire, l'esprit de l'homme; il faut, et c'est la la grande
mission, la mission speciale du ministere de l'instruction publique,
il faut relever l'esprit de l'homme, le tourner vers Dieu, vers la
conscience, vers le beau, le juste et le vrai, vers le desinteresse
et le grand. C'est la, et seulement la, que vous trouverez la paix de
l'homme avec lui-meme, et par consequent la paix de l'homme avec la
societe. (_Tres bien!_)
Pour arriver a ce but, messieurs, que faudrait-il faire? Precisement
tout le contraire de ce qu'ont fait les precedents gouvernements;
precisement tout le contraire de ce que vous propose votre comite des
finances. Outre l'enseignement religieux, qui tient le premier rang
parmi les institutions liberales, il faudrait multiplier les ecoles,
les chaires, les bibliotheques, les musees, les theatres, les
librairies.
Il faudrait multiplier les maisons d'etudes pour les enfants, les
maisons de lecture pour les hommes, tous les etablissements, tous les
asiles ou l'on medite, ou l'on s'instruit, ou l'on se recueille, ou
l'on apprend quelque chose, ou l'on devient meilleur; en un mot, il
faudrait faire penetrer de toutes parts la lumiere dans l'esprit du
peuple; car c'est par les tenebres qu'on le perd. (_Tres bien!_)
Ce resultat, vous l'aurez quand vous voudrez. Quand vous le voudrez,
vous aurez en France un magnifique mouvement intellectuel; ce
mouvement, vous l'avez deja; il ne s'agit que de l'utiliser et de le
diriger; il ne s'agit que de bien cultiver le sol.
La question de l'intelligence, j'appelle sur ce point l'attention de
l'assemblee, la question de l'intelligence est identiquement la meme
que la question de l'agriculture.
L'epoque ou vous etes est une epoque riche et feconde; ce ne sont pas,
messieurs, les intelligences qui manquent, ce ne sont pas les talents,
ce ne sont pas les grandes aptitudes; ce qui manque, c'est l'impulsion
sympathique, c'est l'encouragement enthousiaste d'un grand
gouvernement. (_C'est vrai!_)
Ce gouvernement, j'aurais souhaite que la monarchie le fut; elle
n'a pas su l'etre. Eh bien, ce conseil affectueux que je donnais
loyalement a la monarchie, je le donne loyalement a la republique.
(_Mouvement_.)
Je voterai contre toutes les reductions que je viens de vous signaler,
et qui amoindriraient l'eclat utile des lettres, des arts et des
sciences.
Je ne dirai plus qu'un mot aux honorables auteurs du rapport. Vous
etes tombes dans une meprise regrettable; vous avez cru faire une
economie d'argent, c'est une economie de gloire que vous faites.
(_Nouveau mouvement._) Je la repousse pour la dignite de la France, je
la repousse pour l'honneur de la republique. (_Tres bien! Tres bien!_)

VII
LA SEPARATION DE L'ASSEMBLEE

[Note: L'assemblee constituante discutait sur les propositions
relatives soit a la convocation de l'assemblee legislative, soit a la
modification du decret du 15 decembre concernant les lois organiques.
Jules Favre venait de prononcer un discours tres eloquent, tres
vehement, pour prouver que l'assemblee constituante avait droit et
devoir de rester reunie, quand Victor Hugo monta a la tribune. La
dissolution fut votee.]

29 janvier 1849.
J'entre immediatement dans le debat, et je le prends au point ou le
dernier orateur l'a laisse.
L'heure s'avance, et j'occuperai peu de temps cette tribune.
Je ne suivrai pas l'honorable orateur dans les considerations
politiques de diverse nature qu'il a successivement parcourues; je
m'enfermerai dans la discussion du droit de cette assemblee a se
maintenir ou a se dissoudre. Il a cherche a passionner le debat, je
chercherai a le calmer. (_Chuchotements a gauche_.)
Mais si, chemin faisant, je rencontre quelques-unes des questions
politiques qui touchent a celles qu'il a soulevees, l'honorable et
eloquent orateur peut etre assure que je ne les eviterai pas.
N'en deplaise a l'honorable orateur, je suis de ceux qui pensent que
cette assemblee a recu un mandat tout a la fois illimite et limite.
(_Exclamations_.)
M. LE PRESIDENT.--J'invite tous les membres de l'assemblee au silence.
On doit ecouter M. Victor Hugo comme on a ecoute M. Jules Favre.
M. VICTOR HUGO.--Illimite quant a la souverainete, limite quant a
l'oeuvre a accomplir. (_Tres bien! Mouvement._) Je suis de ceux qui
pensent que l'achevement de la constitution epuise le mandat, et que
le premier effet de la constitution votee doit etre, dans la logique
politique, de dissoudre la constituante.
Et, en effet, messieurs, qu'est-ce que c'est qu'une assemblee
constituante? c'est une revolution agissant et deliberant avec
un horizon indefini devant elle. Et qu'est-ce que c'est qu'une
constitution? C'est une revolution accomplie et desormais
circonscrite. Or peut-on se figurer une telle chose: une revolution a
la fois terminee par le vote de la constitution et continuant par la
presence de la constituante? C'est-a-dire, en d'autres termes, le
definitif proclame et le provisoire maintenu; l'affirmation et la
negation en presence? Une constitution qui regit la nation et qui
ne regit pas le parlement! Tout cela se heurte et s'exclut.
(_Sensation_.)
Je sais qu'aux termes de la constitution vous vous etes attribue la
mission de voter ce qu'on a appele les lois organiques. Je ne dirai
donc pas qu'il ne faut pas les faire; je dirai qu'il faut en faire le
moins possible. Et pourquoi? Les lois organiques font-elles partie
de la constitution? participent-elles de son privilege et de son
inviolabilite? Oh! alors votre droit et votre devoir est de les faire
toutes. Mais les lois organiques ne sont que des lois ordinaires; les
lois organiques ne sont que des lois comme toutes les autres, qui
peuvent etre modifiees, changees, abrogees sans formalites speciales,
et qui, tandis que la constitution, armee par vous, se defendra,
peuvent tomber au premier choc de la premiere assemblee legislative.
Cela est incontestable. A quoi bon les multiplier, alors, et les faire
toutes dans des circonstances ou il est a peine possible de les faire
viables? Une assemblee constituante ne doit rien faire qui ne porte le
caractere de la necessite. Et, ne l'oublions pas, la ou une assemblee
comme celle-ci n'imprime pas le sceau de sa souverainete, elle imprime
le sceau de sa faiblesse.
Je dis donc qu'il faut limiter a un tres petit nombre les lois
organiques que la constitution vous impose le devoir de faire.
J'aborde, pour la traverser rapidement, car, dans les circonstances ou
nous sommes, il ne faut pas irriter un tel debat, j'aborde la question
delicate que j'appellerai la question d'amour-propre, c'est-a-dire le
conflit qu'on cherche a elever entre le ministere et l'assemblee a
l'occasion de la proposition Rateau. Je repete que je traverse cette
question rapidement; vous en comprenez tous le motif, il est puise
dans mon patriotisme et dans le votre. Je dis seulement, et je me
borne a ceci, que cette question ainsi posee, que ce conflit, que
cette susceptibilite, que tout cela est au-dessous de vous.
(_Oui! oui!--Adhesion_.) Les grandes assemblees comme celle-ci ne
compromettent pas la paix du pays par susceptibilite, elles se meuvent
et se gouvernent par des raisons plus hautes. Les grandes assemblees,
messieurs, savent envisager l'heure de leur abdication politique avec
dignite et liberte; elles n'obeissent jamais, soit au jour de leur
avenement, soit au jour de leur retraite, qu'a une seule impulsion,
l'utilite publique. C'est la le sentiment que j'invoque et que je
voudrais eveiller dans vos ames.
J'ecarte donc comme renverses par la discussion les trois arguments
puises, l'un dans la nature de notre mandat, l'autre dans la necessite
de voter les lois organiques, et le troisieme dans la susceptibilite
de l'assemblee en face du ministere.
J'arrive a une derniere objection qui, selon moi, est encore entiere,
et qui est au fond du discours remarquable que vous venez d'entendre.
Cette objection, la voici:
Pour dissoudre l'assemblee, nous invoquons la necessite politique.
Pour la maintenir, on nous oppose la necessite politique. On nous
dit: Il faut que l'assemblee constituante reste a son poste; il faut
qu'elle veille sur son oeuvre; il importe qu'elle ne livre pas la
democratie organisee par elle, qu'elle ne livre pas la constitution a
ce courant qui emporte les esprits vers un avenir inconnu.
Et la-dessus, messieurs, on evoque je ne sais quel fantome d'une
assemblee menacante pour la paix publique; on suppose que la prochaine
assemblee legislative (car c'est la le point reel de la question, j'y
insiste, et j'y appelle votre attention), on suppose que la prochaine
assemblee legislative apportera avec elle les bouleversements et les
calamites, qu'elle perdra la France au lieu de la sauver.
C'est la toute la question, il n'y en a pas d'autre; car si vous
n'aviez pas cette crainte et cette anxiete, vous mes collegues de la
majorite, que j'honore et auxquels je m'adresse, si vous n'aviez pas
cette crainte et cette anxiete, si vous etiez tranquilles sur le
sort de la future assemblee, a coup sur votre patriotisme vous
conseillerait de lui ceder la place.
C'est donc la, a mon sens, le point veritable de la question. Eh bien,
messieurs, j'aborde cette objection. C'est pour la combattre que je
suis monte a cette tribune. On nous dit: Savez-vous ce que sera,
savez-vous ce que fera la prochaine assemblee legislative? Et l'on
conclut, des inquietudes qu'on manifeste, qu'il faut maintenir
l'assemblee constituante.
Eh bien, messieurs, mon intention est de vous montrer ce que valent
ces arguments comminatoires; je le ferai en tres peu de paroles, et
par un simple rapprochement, qui est maintenant de l'histoire, et
qui, a mon sens, eclaire singulierement tout ce cote de la question.
(_Ecoutez! Ecoutez!--Profond silence_.)
Messieurs, il y a moins d'un an, en mars dernier, une partie du
gouvernement provisoire semblait croire a la necessite de se
perpetuer. Des publications officielles, placardees au coin des rues,
affirmaient que l'education politique de la France n'etait pas faite,
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