La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 13
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d’œuvres humaines, et il avait fini par inventer un nouveau système
d’administration. Connaissant les gens auxquels il aurait affaire,
il avait respecté la machine qui fonctionnait alors, qui fonctionne
encore et qui fonctionnera long-temps; car tout le monde se serait
effrayé à l’idée de la refaire, mais personne ne pouvait se refuser à
la simplifier. Le problème à résoudre était donc un meilleur emploi
des mêmes forces. Dans sa plus simple expression, ce plan consistait
à remanier les impôts de manière à les diminuer sans que l’État
perdît ses revenus, et à obtenir, avec un budget égal au budget qui
soulevait alors tant de folles discussions, des résultats deux fois
plus considérables que les résultats actuels. Une longue pratique avait
démontré à Rabourdin, qu’en toute chose la perfection était produite
par de simples revirements. Économiser, c’est simplifier. Simplifier,
c’est supprimer un rouage inutile: il y a donc déplacement. Aussi,
son système reposait-il sur un déclassement, il se traduisait par une
nouvelle nomenclature administrative. Là gît peut-être la raison de la
haine que s’attirent les novateurs. Les suppressions exigées par le
perfectionnement, et d’abord mal comprises, menacent des existences qui
ne se résolvent pas facilement à changer de condition. Ce qui rendait
Rabourdin vraiment grand, était d’avoir su contenir l’enthousiasme qui
saisit tous les inventeurs, d’avoir cherché patiemment un engrenage
à chaque mesure afin d’éviter les chocs, en laissant au temps et à
l’expérience le soin de démontrer l’excellence de chaque changement. La
grandeur du résultat ferait croire à son impossibilité, si l’on perdait
de vue cette pensée au milieu de la rapide analyse de ce système.
Il n’est donc pas indifférent d’indiquer, d’après ses confidences,
quelqu’incomplètes qu’elles furent, le point d’où il partit pour
embrasser l’horizon administratif. Ce récit, qui tient d’ailleurs au
cœur de l’intrigue, expliquera peut-être aussi quelques malheurs des
mœurs présentes.
Xavier avait d’abord été profondément ému par les misères qu’il avait
reconnues dans l’existence des employés, il s’était demandé d’où venait
leur croissante déconsidération; il en avait recherché les causes, et
les avait trouvées dans ces petites révolutions partielles qui furent
comme le remous de la tempête de 1789 et que les historiens des grands
mouvements sociaux négligent d’examiner, quoiqu’en définitif elles
aient fait nos mœurs ce qu’elles sont.
Autrefois, sous la monarchie, les armées bureaucratiques n’existaient
point. Peu nombreux, les employés obéissaient à un premier ministre
toujours en communication avec le souverain, et servaient ainsi
presque directement le roi. Les chefs de ces serviteurs zélés
étaient simplement nommés des _premiers commis_. Dans les parties
d’administration que le roi ne régissait pas lui-même, comme les
Fermes, les employés étaient à leurs chefs ce que les commis d’une
maison de commerce sont à leurs patrons: ils apprenaient une science
qui devait leur servir à se faire une fortune. Ainsi, le moindre point
de la circonférence se rattachait au centre et en recevait la vie. Il y
avait donc dévouement et foi. Depuis 1789, l’État, la _patrie_ si l’on
veut, a remplacé le Prince. Au lieu de relever directement d’un premier
magistrat politique, les commis sont devenus, malgré nos belles idées
sur la patrie, _des employés du gouvernement_; leurs chefs flottent à
tous les vents d’un pouvoir qui ne sait pas la veille s’il existera
le lendemain et qui s’appelle _le Ministère_. Le courant des affaires
devant toujours s’expédier, il surnage une certaine quantité de commis
qui se sait indispensable quoique congéable à merci et qui veut rester
en place. La bureaucratie, pouvoir gigantesque mis en mouvement par
des nains, est née ainsi. Si en subordonnant toute chose et tout homme
à sa volonté, Napoléon avait retardé pour un moment l’influence de la
bureaucratie, ce rideau pesant placé entre le bien à faire et celui
qui peut l’ordonner, elle s’était définitivement organisée sous le
gouvernement constitutionnel, nécessairement ami des médiocrités, grand
amateur de pièces probantes et de comptes, enfin tracassier comme une
petite bourgeoise. Heureux de voir les ministres en lutte constante
avec quatre cents petits esprits, avec dix ou douze têtes ambitieuses
et de mauvaise foi, les Bureaux se hâtèrent de se rendre indispensables
en se substituant à l’action vivante par l’action écrite, et ils
créèrent une puissance d’inertie appelée le Rapport. Expliquons le
Rapport.
Quand les rois eurent des ministres, ce qui n’a commencé que sous Louis
XV, ils se firent faire des rapports sur les questions importantes,
au lieu de tenir comme autrefois, conseil avec les grands de l’État.
Insensiblement, les ministres furent amenés par leurs Bureaux à faire
comme les rois. Occupés de se défendre devant les deux Chambres et
devant la cour, ils se laissèrent mener par les lisières du rapport. Il
ne se présenta rien d’important dans l’administration, que le ministre,
à la chose la plus urgente, ne répondît:--J’ai demandé un rapport. Le
rapport devint ainsi, pour l’affaire et pour le ministre, ce qu’est
le rapport à la Chambre des Députés pour les lois: une consultation
où sont traitées les raisons contre et pour avec plus ou moins de
partialité; en sorte que le ministre, de même que la Chambre, se trouve
tout aussi avancé avant qu’après le rapport. Toute espèce de parti se
prend en un instant. Quoi qu’on fasse, il faut arriver au moment où
l’on se décide. Plus on met en bataille de raisons pour et de raisons
contre, moins le jugement est sain. Les plus belles choses de la France
se sont faites quand il n’existait pas de rapport et que les décisions
étaient spontanées. La loi suprême de l’homme d’état est d’appliquer
des formules précises à tous les cas, à la manière des juges et des
médecins.
Rabourdin s’était dit: On est ministre pour avoir de la décision,
connaître les affaires et les faire marcher. Et il voyait le rapport
régnant en France depuis le colonel jusqu’au maréchal, depuis le
commissaire de police jusqu’au roi, depuis les préfets jusqu’aux
ministres, depuis la Chambre jusqu’à la loi. Tout commençait à se
discuter, se balancer et se contre-balancer de vive voix et par écrit,
tout prenait la forme littéraire. La France allait se ruiner malgré
de si beaux rapports, et disserter au lieu d’agir. Il se faisait en
France un million de rapports écrits par année; aussi la bureaucratie
régnait-elle! Les dossiers, les cartons, les paperasses à l’appui des
pièces sans lesquelles la France serait perdue, la circulaire sans
laquelle elle n’irait pas, fleurissaient. La bureaucratie commençait
à entretenir à son profit la méfiance entre la recette et la dépense,
elle calomniait l’administration pour le salut de l’administrateur.
Enfin elle inventait les fils lilliputiens qui enchaînent la France
à la centralisation parisienne, comme si, de 1500 à 1800, la France
n’avait rien pu faire sans trente mille commis.
En s’attachant à la chose publique, comme le guy au poirier, l’employé
s’en désintéressa complétement, et voici comme. Obligés d’obéir aux
princes ou aux Chambres qui leur imposent des parties prenantes au
budget et forcés de garder des travailleurs, les ministres diminuaient
les salaires et augmentaient les emplois, en pensant que plus il y
aurait de monde employé par le gouvernement, plus le gouvernement
serait fort. La loi contraire est un axiome écrit dans l’univers:
il n’y a d’énergie que par la rareté des principes agissants. Aussi
l’événement a-t-il prouvé l’erreur du ministérialisme. Pour implanter
un gouvernement au cœur d’une nation, il faut savoir y rattacher _des
intérêts_ et non _des hommes_. Conduit à mépriser le gouvernement
qui lui retirait à la fois considération et salaire, l’employé se
comportait en ce moment avec lui comme une courtisane avec un vieil
amant, il lui donnait du travail pour son argent: situation aussi
peu tolérable pour l’administration que pour l’employé, si tous deux
osaient se tâter le pouls, et si les gros salaires n’étouffaient pas
la voix des petits. Seulement occupé de se maintenir, de toucher ses
appointements et d’arriver à sa pension, l’employé se croyait tout
permis pour obtenir ce grand résultat. Cet état de choses amenait
le servilisme du commis, il engendrait de perpétuelles intrigues
au sein des Ministères où les pauvres employés luttaient contre
une aristocratie dégénérée qui venait pâturer sur les communaux de
la bourgeoisie, en exigeant des places pour ses enfants ruinés. Un
homme supérieur pouvait difficilement marcher le long de ces haies
tortueuses, plier, ramper, se couler dans la fange de ces sentines où
les têtes remarquables effrayaient tout le monde. Un génie ambitieux se
vieillit pour obtenir la triple couronne, il n’imite pas Sixte-Quint
pour devenir Chef de Bureau. Il ne restait ou ne venait que des
paresseux, des incapables ou des niais. Ainsi s’établissait lentement
la médiocrité de l’Administration française. Entièrement composée de
petits esprits, la bureaucratie mettait un obstacle à la prospérité
du pays, retardait sept ans dans ses cartons le projet d’un canal
qui eût stimulé la production d’une province, s’épouvantait de tout,
perpétuait les lenteurs, éternisait les abus qui la perpétuaient et
l’éternisaient elle-même; elle tenait tout et le ministre même en
lisière; enfin elle étouffait les hommes de talent assez hardis pour
vouloir aller sans elle ou l’éclairer sur ses sottises. Le livre des
pensions venait d’être publié, Rabourdin y vit un garçon de bureau
inscrit pour une retraite supérieure à celle des vieux colonels criblés
de blessures. L’histoire de la bureaucratie se lisait là tout entière.
Autre plaie engendrée par les mœurs modernes, et qu’il comptait parmi
les causes de cette secrète démoralisation: l’Administration à Paris
n’a point de subordination réelle, il y règne une égalité complète
entre le chef d’une Division importante et le dernier expéditionnaire:
l’un est aussi savant que l’autre dans une arène où l’on se rejette
la besogne les uns aux autres. Les employés se jugeaient entre eux
sans aucun respect. L’instruction, également dispensée sans mesure aux
masses, amène le fils d’un concierge de ministère à prononcer sur le
sort d’un homme de mérite ou d’un grand propriétaire chez qui son père
a tiré le cordon de la porte. Le dernier venu peut donc lutter avec
le plus ancien. Un riche surnuméraire éclabousse son chef en allant
à Longchamp dans un tilbury qui porte une jolie femme à laquelle il
indique par un mouvement de son fouet le pauvre père de famille à
pied, en disant: _Voilà mon chef!_ Les Libéraux nommaient cet état de
choses le PROGRÈS, Rabourdin y voyait l’ANARCHIE au cœur du pouvoir;
car il voyait en résultat des intrigues agitées, comme celles du
sérail, entre des eunuques, des femmes et des sultans imbéciles,
des petitesses de religieuses, des vexations sourdes, des tyrannies
de collége, des travaux diplomatiques à effrayer un ambassadeur
entrepris pour une gratification ou pour une augmentation, des sauts
de puces attelées à un char de carton; des malices de nègre faites au
ministre lui-même; puis les gens réellement utiles, les travailleurs,
victimes des parasites; les gens dévoués à leur pays qui tranchent
vigoureusement sur la masse des incapacités, succombant sous d’ignobles
trahisons. Toutes les hautes places allaient appartenir à l’influence
parlementaire et non à la Royauté; les employés se voyaient alors dans
la condition de rouages vissés à une machine: il ne s’agissait plus
pour eux que d’être plus ou moins graissés. Cette fatale conviction
étouffait bien des mémoires écrits en conscience sur les plaies
secrètes du pays, désarmait bien des courages, corrodait les probités
les plus sévères, fatiguées de l’injustice et conviées à l’insouciance
par de dissolvants ennuis. Un commis des frères Rothschild correspond
avec toute l’Angleterre: un seul employé pourrait correspondre avec
tous les préfets; mais là où l’un vient apprendre les éléments de sa
fortune, l’autre perd inutilement son temps, sa vie et sa santé. Là
était le mal. Certes un pays ne semble pas immédiatement menacé de
mort parce qu’un employé de talent se retire et qu’un homme médiocre
le remplace. Malheureusement pour les nations, aucun homme ne paraît
indispensable à leur existence. Mais quand tout s’est à la longue
amoindri, les nations disparaissent. Chacun peut, par instruction,
aller voir à Venise, à Madrid, à Amsterdam, à Stockholm et à Rome les
places où existèrent d’immenses pouvoirs, aujourd’hui détruits par la
petitesse qui s’y est infiltrée en gagnant les sommités. Au jour d’une
lutte, tout s’est trouvé débile, l’État a succombé devant une faible
attaque. Adorer le sot qui réussit, ne pas s’attrister à la chute
d’un homme de talent est le résultat de notre triste éducation et de
nos mœurs qui poussent les gens d’esprit à la raillerie et le génie
au désespoir. Mais quel problème difficile à résoudre que celui de la
réhabilitation des employés, au moment où le libéralisme criait par ses
journaux dans toutes les boutiques industrielles que les traitements
des employés constituaient un vol perpétuel, quand il configurait les
chapitres du budget en forme de sangsues, et demandait chaque année
où allait le milliard des impôts. Aux yeux de monsieur Rabourdin,
l’employé, relativement au budget, était ce que le joueur est au jeu;
tout ce qu’il en emporte, il le lui restitue. Tout gros traitement
impliquait une production. Payer mille francs par an à un homme pour
lui demander toutes ses journées, n’était-ce pas organiser le vol et la
misère? un forçat coûte presque autant et travaille moins. Mais vouloir
qu’un homme auquel l’État donnerait douze mille francs par an se vouât
à son pays, était un contrat profitable à tous deux, et qui pouvait
tenter les capacités.
Ces réflexions avaient donc conduit Rabourdin à une refonte du
personnel. Employer peu de monde, tripler ou doubler les traitements et
supprimer les pensions; prendre les employés jeunes, comme faisaient
Napoléon, Louis XIV, Richelieu et Ximenès, mais les garder long-temps
en leur réservant les hauts emplois et de grands honneurs, étaient les
points capitaux d’une réforme aussi utile à l’État qu’à l’employé. Il
est difficile de raconter en détail, chapitre par chapitre, un plan qui
embrassait le budget et qui descendait dans les infiniment petits de
l’Administration pour les synthétiser; mais peut-être une indication
des principales réformes suffira-t-elle à ceux qui connaissent comme à
ceux qui ignorent la constitution administrative. Quoique la position
d’un historien soit dangereuse en racontant un plan qui ressemble à
de la politique faite au coin du feu, encore est-il nécessaire de le
crayonner, afin d’expliquer l’homme par l’œuvre. Supprimez le récit de
ses travaux, vous ne voudrez plus croire le narrateur sur parole, s’il
se contentait d’affirmer le talent ou l’audace d’un Chef de bureau.
Rabourdin divisait la haute administration en trois ministères. Il
avait pensé que si jadis il se trouvait des têtes assez fortes pour
embrasser l’ensemble des affaires intérieures et extérieures, la
France d’aujourd’hui ne manquerait jamais de Mazarin, de Suger, de
Sully, de Choiseul, de Colbert pour diriger des ministères plus
vastes que les ministères actuels. D’ailleurs, constitutionnellement
parlant, trois ministres s’accordent plus facilement que sept. Puis,
il est moins difficile aussi de se tromper quant au talent. Enfin,
peut-être la royauté éviterait-elle ainsi ses perpétuelles oscillations
ministérielles qui ne permettent de suivre aucun plan de politique
extérieure, ni d’accomplir aucune amélioration intérieure. En Autriche,
où des nations diverses réunies offrent des intérêts différents à
concilier et à conduire sous une même couronne, deux hommes d’État
supportaient en ce moment le poids des affaires publiques, sans en
être accablés. La France était-elle plus pauvre que l’Allemagne en
capacités politiques? D’abord n’était-il pas naturel de réunir le
ministère de la marine au ministère de la guerre? Pour Rabourdin, la
marine paraissait un des comptes courants du ministère de la guerre,
comme l’artillerie, la cavalerie, l’infanterie et l’intendance.
N’était-ce pas un contre-sens de donner aux amiraux et aux maréchaux
une administration séparée, quand ils marchaient vers un but commun: la
défense du pays, l’attaque de l’ennemi, la protection des possessions
nationales? Le ministère de l’intérieur devait réunir le commerce, la
police et les finances, sous peine de mentir à son nom. Au ministère
des affaires étrangères appartenaient la justice, la maison du roi, et
tout ce qui, dans le ministère de l’intérieur, concerne les arts, les
lettres et les grâces: toute protection devait découler immédiatement
du souverain, et ce ministère impliquait la présidence du Conseil.
Chacun de ces trois ministères ne comportait pas plus de deux cents
employés à son administration centrale, où Rabourdin les logeait tous,
comme jadis sous la monarchie. En prenant pour moyenne une somme de
douze mille francs par tête, il ne comptait que sept millions pour
des chapitres qui en coûtaient plus de vingt dans le budget actuel;
car, en réduisant ainsi les ministères à trois têtes, il supprimait
des administrations entières devenues inutiles, et les énormes frais
de leurs établissements dans Paris. Il prouvait qu’un arrondissement
devait être administré par dix hommes, une préfecture par douze au
plus, ce qui ne supposait que cinq mille employés pour toute la France,
Justice et Armée à part, nombre que dépassait alors le chiffre seul
des employés aux ministères. Mais, dans son plan, les greffiers des
tribunaux étaient chargés du régime hypothécaire; mais le ministère
public était chargé de l’enregistrement et des domaines, car il avait
réuni dans un même centre les parties similaires: ainsi l’hypothèque,
la succession, l’enregistrement ne sortaient pas de leur cercle
d’action, et ne nécessitaient que trois surnuméraires par Tribunal, et
trois par Cour royale. L’application constante de ce principe avait
conduit Rabourdin à la réforme des finances. Il avait confondu toutes
les perceptions d’impôts en une seule, en taxant la consommation en
masse au lieu de taxer la propriété. Selon lui, la consommation était
l’unique matière imposable en temps de paix. La contribution foncière
devait être réservée pour les cas de guerre. Alors seulement l’État
pouvait demander des sacrifices au sol, car alors il s’agissait de le
défendre; mais, en temps de paix, c’était une lourde faute politique
que de l’inquiéter au delà d’une certaine limite; on ne le trouvait
plus dans les grandes crises. Ainsi l’_Emprunt_ pendant la paix, parce
qu’il se faisait au pair et non à cinquante pour cent de perte, comme
dans les temps mauvais; puis, pendant la guerre, la _contribution
foncière_.
--L’invasion de 1814 et de 1815, disait Rabourdin à ses amis, a fondé
en France et démontré une institution que ni Law ni Napoléon n’avaient
pu établir: le _crédit_.
Malheureusement Xavier considérait les vrais principes de cette
admirable machine comme encore peu compris. Rabourdin imposait la
consommation par le mode des contributions directes, en supprimant
tout l’attirail des contributions indirectes. La recette de l’impôt se
résolvait par un rôle unique composé de divers articles. Il abattait
ainsi les gênantes barrières qui barricadent les villes auxquelles il
procurait de plus gros revenus en simplifiant leurs modes actuels de
perception énormément coûteux. Diminuer la lourdeur de l’impôt n’est
pas en matière de finance diminuer l’impôt, c’est le mieux répartir;
l’alléger, c’est augmenter la masse des transactions en leur laissant
plus de jeu; l’individu paye moins et l’État reçoit davantage. Cette
réforme, qui peut sembler immense, reposait sur un mécanisme fort
simple. Rabourdin avait pris l’impôt personnel et mobilier comme la
représentation la plus fidèle de la consommation générale. Les fortunes
individuelles s’expriment admirablement en France par le loyer, par
le nombre des domestiques, par les chevaux et les voitures de luxe
qui se prêtent à la fiscalité; car les habitations et ce qu’elles
contiennent varient peu, et disparaissaient difficilement. Après
avoir indiqué les moyens de confectionner un rôle de contributions
mobilières plus sincère que ne l’était le rôle actuel, il répartissait
les sommes que produisaient au trésor les impôts dits _indirects_ en
_un tant pour cent_ de chaque cote individuelle. En effet, l’impôt
est un prélèvement d’argent fait sur les choses ou sur les personnes
sous des déguisements plus ou moins spécieux; mais le temps de ces
déguisements, bon quand il fallait extorquer l’argent, était passé dans
une époque où la classe sur laquelle pèsent les impôts sait pourquoi
l’État les prend et par quel mécanisme il les lui rend. En effet, le
budget n’est pas un coffre-fort, mais un arrosoir; plus il prend et
répand d’eau, plus un pays prospère. Ainsi supposez six millions de
_cotes aisées_ (il en avait prouvé l’existence, en y comprenant les
_cotes riches_), ne valait-il pas mieux leur demander directement
_un droit de vin_ qui ne serait pas plus ridicule que l’impôt _des
portes et fenêtres_ et produirait cent millions, plutôt que de les
tourmenter en imposant la chose même? Par cette régularisation de
l’impôt, chaque particulier payerait moins en réalité, l’État recevrait
davantage, et les consommateurs jouiraient d’une immense réduction
dans le prix des choses que l’État ne soumettrait plus à des tortures
infinies. Il conservait un droit de culture sur les vignobles, afin
de protéger cette industrie contre la trop grande abondance de ses
produits. Puis, pour atteindre les consommations des cotes pauvres,
les patentes des débitants étaient taxées d’après la population des
lieux qu’ils habitaient. Ainsi, sous trois formes: droit de vin,
droit de culture et patente, le Trésor levait une recette énorme sans
frais ni vexations, là où il y avait un impôt vexatoire partagé entre
ses employés et lui. L’impôt pesait ainsi sur le riche au lieu de
tourmenter le pauvre. Un autre exemple. Supposez un franc ou deux, par
cote, de droits de sel, vous obtenez dix ou douze millions, la gabelle
moderne disparaît, la population pauvre respire, l’agriculture est
soulagée, l’État reçoit tout autant, et nulle cote ne se plaint, car
toute cote est propriétaire, et peut reconnaître immédiatement les
bénéfices d’un impôt ainsi réparti en voyant au fond des campagnes la
vie s’améliorant. Enfin, d’année en année, l’État verrait le nombre
des _cotes aisées_ croissant. En supprimant l’administration des
contributions indirectes, machine extrêmement coûteuse, et qui est
un État dans l’État, le Trésor et les particuliers y gagnaient donc
énormément, à ne considérer que l’économie des frais de perception.
Le tabac et la poudre s’affermaient en régie, sous une surveillance.
Le système sur ces deux régies, développé par d’autres que Rabourdin
lors du renouvellement de la loi sur les tabacs, était si convaincant
que cette loi n’eût point passé dans une Chambre à qui l’on n’aurait
pas mis le marché à la main, comme le fit alors le ministère. Ce fut
alors moins une question de finance qu’une question de gouvernement.
L’État ne possédait plus rien en propre, ni forêts, ni mines, ni
exploitations. Aux yeux de Rabourdin, l’État, possesseur de domaines,
constituait un contre-sens administratif, car l’État ne sait pas
faire valoir et se prive de contributions; il perd deux produits à la
fois. Quant aux fabriques du gouvernement, c’était le même non-sens
reporté dans la sphère de l’industrie. L’État obtient des produits
plus coûteux que ceux du commerce, plus lentement confectionnés, et
manque à percevoir ses droits sur les mouvements de l’Industrie, à
laquelle il retranche des alimentations. Était-ce administrer un pays
que d’y fabriquer au lieu d’y faire fabriquer, d’y posséder au lieu de
créer le plus de possessions diverses? L’État n’exigeait plus un seul
cautionnement en argent. Rabourdin n’admettait que des cautionnements
hypothécaires. Voici pourquoi. Ou l’État gardait le cautionnement en
nature, et c’était gêner le mouvement de l’argent; ou il l’employait
à un taux supérieur à l’intérêt qu’il en donnait, et c’était un vol
ignoble; ou il y perdait, et c’était une sottise; enfin, s’il disposait
un jour de la masse des cautionnements, il préparait dans certains
cas une banqueroute horrible. L’impôt territorial disparaissait donc
en partie, Rabourdin en conservait une faible portion, ne fût-ce
que comme point de départ en cas de guerre; mais évidemment les
productions du sol devenaient libres, et l’Industrie, en trouvant les
matières premières à bas prix, pouvait lutter avec l’étranger sans le
secours trompeur des Douanes. Les riches administraient gratuitement
les Départements, en ayant pour récompense la pairie sous certaines
conditions. Les magistrats, les corps savants, les officiers inférieurs
voyaient leurs services honorablement récompensés. Il n’y avait pas
d’employé qui n’obtînt une immense considération, méritée par l’étendue
de ses travaux et l’importance de ses appointements; chacun d’eux
pensait lui-même à son avenir, et la France n’avait plus sur le corps
le cancer des pensions. En résultat, Rabourdin trouvait sept cents
millions de dépenses seulement et douze cents millions de recettes.
Il était clair qu’un remboursement de cinq cents millions annuels
jouait alors avec un peu plus de force que le maigre amortissement
dont le vice était démontré. Là, selon lui, l’État se faisait encore
rentier, comme l’État s’entêtait d’ailleurs à posséder et à fabriquer.
Enfin, pour exécuter sans secousses sa réforme et pour éviter une
Saint-Barthélemy d’employés, Rabourdin demandait vingt années.
Telles étaient les pensées mûries par cet homme depuis le jour où sa
place fut donnée à monsieur de La Billardière, homme incapable. Ce
plan si vaste en apparence, si simple en réalité, qui supprimait tant
de gros états-majors et tant de petites places également inutiles,
exigeait de continuels calculs, des statistiques exactes, des preuves
évidentes. Rabourdin avait pendant long-temps étudié le budget sur
sa double face, celle des Voies et Moyens, celle des Dépenses. Aussi
avait-il passé bien des nuits à l’insu de sa femme. Ce n’était rien
encore que d’avoir osé concevoir ce plan et de l’avoir superposé sur
le cadavre administratif, il fallait s’adresser à un ministre capable
de l’apprécier. Le succès de Rabourdin tenait donc à la tranquillité
d’une politique alors toujours agitée. Il ne considéra le gouvernement
comme définitivement assis qu’au moment où trois cents députés
eurent le courage de former une majorité compacte, systématiquement
ministérielle. Une administration fondée sur cette base s’était établie
depuis que Rabourdin avait achevé ses travaux. A cette époque, le luxe
de la paix due aux Bourbons faisait oublier le luxe guerrier du temps
où la France brillait comme un vaste camp, prodigue et magnifique parce
qu’il était victorieux. Après sa campagne en Espagne, le Ministère
paraissait devoir commencer une de ces paisibles carrières où le bien
peut s’accomplir, et depuis trois mois un nouveau règne avait commencé
sans éprouver aucune entrave, car le libéralisme de la Gauche avait
salué Charles X avec autant d’enthousiasme que la Droite. C’était
à tromper les gens les plus clairvoyants. Le moment semblait donc
propice. N’était-ce pas un gage de durée pour une administration que
de proposer et de mettre à fin une réforme dont les résultats étaient
si grands? Jamais donc Rabourdin ne s’était montré plus soucieux, plus
préoccupé le matin quand il allait par les rues au Ministère, et le
soir à quatre heures et demie quand il en revenait.
De son côté, madame Rabourdin, désolée de sa vie manquée, ennuyée
de travailler en secret pour se procurer quelques jouissances de
toilette, ne s’était jamais montrée plus aigrement mécontente, mais,
en femme attachée à son mari, elle regardait comme indignes d’une
femme supérieure les honteux commerces par lesquels certaines femmes
d’employés suppléaient à l’insuffisance des appointements. Cette raison
d’administration. Connaissant les gens auxquels il aurait affaire,
il avait respecté la machine qui fonctionnait alors, qui fonctionne
encore et qui fonctionnera long-temps; car tout le monde se serait
effrayé à l’idée de la refaire, mais personne ne pouvait se refuser à
la simplifier. Le problème à résoudre était donc un meilleur emploi
des mêmes forces. Dans sa plus simple expression, ce plan consistait
à remanier les impôts de manière à les diminuer sans que l’État
perdît ses revenus, et à obtenir, avec un budget égal au budget qui
soulevait alors tant de folles discussions, des résultats deux fois
plus considérables que les résultats actuels. Une longue pratique avait
démontré à Rabourdin, qu’en toute chose la perfection était produite
par de simples revirements. Économiser, c’est simplifier. Simplifier,
c’est supprimer un rouage inutile: il y a donc déplacement. Aussi,
son système reposait-il sur un déclassement, il se traduisait par une
nouvelle nomenclature administrative. Là gît peut-être la raison de la
haine que s’attirent les novateurs. Les suppressions exigées par le
perfectionnement, et d’abord mal comprises, menacent des existences qui
ne se résolvent pas facilement à changer de condition. Ce qui rendait
Rabourdin vraiment grand, était d’avoir su contenir l’enthousiasme qui
saisit tous les inventeurs, d’avoir cherché patiemment un engrenage
à chaque mesure afin d’éviter les chocs, en laissant au temps et à
l’expérience le soin de démontrer l’excellence de chaque changement. La
grandeur du résultat ferait croire à son impossibilité, si l’on perdait
de vue cette pensée au milieu de la rapide analyse de ce système.
Il n’est donc pas indifférent d’indiquer, d’après ses confidences,
quelqu’incomplètes qu’elles furent, le point d’où il partit pour
embrasser l’horizon administratif. Ce récit, qui tient d’ailleurs au
cœur de l’intrigue, expliquera peut-être aussi quelques malheurs des
mœurs présentes.
Xavier avait d’abord été profondément ému par les misères qu’il avait
reconnues dans l’existence des employés, il s’était demandé d’où venait
leur croissante déconsidération; il en avait recherché les causes, et
les avait trouvées dans ces petites révolutions partielles qui furent
comme le remous de la tempête de 1789 et que les historiens des grands
mouvements sociaux négligent d’examiner, quoiqu’en définitif elles
aient fait nos mœurs ce qu’elles sont.
Autrefois, sous la monarchie, les armées bureaucratiques n’existaient
point. Peu nombreux, les employés obéissaient à un premier ministre
toujours en communication avec le souverain, et servaient ainsi
presque directement le roi. Les chefs de ces serviteurs zélés
étaient simplement nommés des _premiers commis_. Dans les parties
d’administration que le roi ne régissait pas lui-même, comme les
Fermes, les employés étaient à leurs chefs ce que les commis d’une
maison de commerce sont à leurs patrons: ils apprenaient une science
qui devait leur servir à se faire une fortune. Ainsi, le moindre point
de la circonférence se rattachait au centre et en recevait la vie. Il y
avait donc dévouement et foi. Depuis 1789, l’État, la _patrie_ si l’on
veut, a remplacé le Prince. Au lieu de relever directement d’un premier
magistrat politique, les commis sont devenus, malgré nos belles idées
sur la patrie, _des employés du gouvernement_; leurs chefs flottent à
tous les vents d’un pouvoir qui ne sait pas la veille s’il existera
le lendemain et qui s’appelle _le Ministère_. Le courant des affaires
devant toujours s’expédier, il surnage une certaine quantité de commis
qui se sait indispensable quoique congéable à merci et qui veut rester
en place. La bureaucratie, pouvoir gigantesque mis en mouvement par
des nains, est née ainsi. Si en subordonnant toute chose et tout homme
à sa volonté, Napoléon avait retardé pour un moment l’influence de la
bureaucratie, ce rideau pesant placé entre le bien à faire et celui
qui peut l’ordonner, elle s’était définitivement organisée sous le
gouvernement constitutionnel, nécessairement ami des médiocrités, grand
amateur de pièces probantes et de comptes, enfin tracassier comme une
petite bourgeoise. Heureux de voir les ministres en lutte constante
avec quatre cents petits esprits, avec dix ou douze têtes ambitieuses
et de mauvaise foi, les Bureaux se hâtèrent de se rendre indispensables
en se substituant à l’action vivante par l’action écrite, et ils
créèrent une puissance d’inertie appelée le Rapport. Expliquons le
Rapport.
Quand les rois eurent des ministres, ce qui n’a commencé que sous Louis
XV, ils se firent faire des rapports sur les questions importantes,
au lieu de tenir comme autrefois, conseil avec les grands de l’État.
Insensiblement, les ministres furent amenés par leurs Bureaux à faire
comme les rois. Occupés de se défendre devant les deux Chambres et
devant la cour, ils se laissèrent mener par les lisières du rapport. Il
ne se présenta rien d’important dans l’administration, que le ministre,
à la chose la plus urgente, ne répondît:--J’ai demandé un rapport. Le
rapport devint ainsi, pour l’affaire et pour le ministre, ce qu’est
le rapport à la Chambre des Députés pour les lois: une consultation
où sont traitées les raisons contre et pour avec plus ou moins de
partialité; en sorte que le ministre, de même que la Chambre, se trouve
tout aussi avancé avant qu’après le rapport. Toute espèce de parti se
prend en un instant. Quoi qu’on fasse, il faut arriver au moment où
l’on se décide. Plus on met en bataille de raisons pour et de raisons
contre, moins le jugement est sain. Les plus belles choses de la France
se sont faites quand il n’existait pas de rapport et que les décisions
étaient spontanées. La loi suprême de l’homme d’état est d’appliquer
des formules précises à tous les cas, à la manière des juges et des
médecins.
Rabourdin s’était dit: On est ministre pour avoir de la décision,
connaître les affaires et les faire marcher. Et il voyait le rapport
régnant en France depuis le colonel jusqu’au maréchal, depuis le
commissaire de police jusqu’au roi, depuis les préfets jusqu’aux
ministres, depuis la Chambre jusqu’à la loi. Tout commençait à se
discuter, se balancer et se contre-balancer de vive voix et par écrit,
tout prenait la forme littéraire. La France allait se ruiner malgré
de si beaux rapports, et disserter au lieu d’agir. Il se faisait en
France un million de rapports écrits par année; aussi la bureaucratie
régnait-elle! Les dossiers, les cartons, les paperasses à l’appui des
pièces sans lesquelles la France serait perdue, la circulaire sans
laquelle elle n’irait pas, fleurissaient. La bureaucratie commençait
à entretenir à son profit la méfiance entre la recette et la dépense,
elle calomniait l’administration pour le salut de l’administrateur.
Enfin elle inventait les fils lilliputiens qui enchaînent la France
à la centralisation parisienne, comme si, de 1500 à 1800, la France
n’avait rien pu faire sans trente mille commis.
En s’attachant à la chose publique, comme le guy au poirier, l’employé
s’en désintéressa complétement, et voici comme. Obligés d’obéir aux
princes ou aux Chambres qui leur imposent des parties prenantes au
budget et forcés de garder des travailleurs, les ministres diminuaient
les salaires et augmentaient les emplois, en pensant que plus il y
aurait de monde employé par le gouvernement, plus le gouvernement
serait fort. La loi contraire est un axiome écrit dans l’univers:
il n’y a d’énergie que par la rareté des principes agissants. Aussi
l’événement a-t-il prouvé l’erreur du ministérialisme. Pour implanter
un gouvernement au cœur d’une nation, il faut savoir y rattacher _des
intérêts_ et non _des hommes_. Conduit à mépriser le gouvernement
qui lui retirait à la fois considération et salaire, l’employé se
comportait en ce moment avec lui comme une courtisane avec un vieil
amant, il lui donnait du travail pour son argent: situation aussi
peu tolérable pour l’administration que pour l’employé, si tous deux
osaient se tâter le pouls, et si les gros salaires n’étouffaient pas
la voix des petits. Seulement occupé de se maintenir, de toucher ses
appointements et d’arriver à sa pension, l’employé se croyait tout
permis pour obtenir ce grand résultat. Cet état de choses amenait
le servilisme du commis, il engendrait de perpétuelles intrigues
au sein des Ministères où les pauvres employés luttaient contre
une aristocratie dégénérée qui venait pâturer sur les communaux de
la bourgeoisie, en exigeant des places pour ses enfants ruinés. Un
homme supérieur pouvait difficilement marcher le long de ces haies
tortueuses, plier, ramper, se couler dans la fange de ces sentines où
les têtes remarquables effrayaient tout le monde. Un génie ambitieux se
vieillit pour obtenir la triple couronne, il n’imite pas Sixte-Quint
pour devenir Chef de Bureau. Il ne restait ou ne venait que des
paresseux, des incapables ou des niais. Ainsi s’établissait lentement
la médiocrité de l’Administration française. Entièrement composée de
petits esprits, la bureaucratie mettait un obstacle à la prospérité
du pays, retardait sept ans dans ses cartons le projet d’un canal
qui eût stimulé la production d’une province, s’épouvantait de tout,
perpétuait les lenteurs, éternisait les abus qui la perpétuaient et
l’éternisaient elle-même; elle tenait tout et le ministre même en
lisière; enfin elle étouffait les hommes de talent assez hardis pour
vouloir aller sans elle ou l’éclairer sur ses sottises. Le livre des
pensions venait d’être publié, Rabourdin y vit un garçon de bureau
inscrit pour une retraite supérieure à celle des vieux colonels criblés
de blessures. L’histoire de la bureaucratie se lisait là tout entière.
Autre plaie engendrée par les mœurs modernes, et qu’il comptait parmi
les causes de cette secrète démoralisation: l’Administration à Paris
n’a point de subordination réelle, il y règne une égalité complète
entre le chef d’une Division importante et le dernier expéditionnaire:
l’un est aussi savant que l’autre dans une arène où l’on se rejette
la besogne les uns aux autres. Les employés se jugeaient entre eux
sans aucun respect. L’instruction, également dispensée sans mesure aux
masses, amène le fils d’un concierge de ministère à prononcer sur le
sort d’un homme de mérite ou d’un grand propriétaire chez qui son père
a tiré le cordon de la porte. Le dernier venu peut donc lutter avec
le plus ancien. Un riche surnuméraire éclabousse son chef en allant
à Longchamp dans un tilbury qui porte une jolie femme à laquelle il
indique par un mouvement de son fouet le pauvre père de famille à
pied, en disant: _Voilà mon chef!_ Les Libéraux nommaient cet état de
choses le PROGRÈS, Rabourdin y voyait l’ANARCHIE au cœur du pouvoir;
car il voyait en résultat des intrigues agitées, comme celles du
sérail, entre des eunuques, des femmes et des sultans imbéciles,
des petitesses de religieuses, des vexations sourdes, des tyrannies
de collége, des travaux diplomatiques à effrayer un ambassadeur
entrepris pour une gratification ou pour une augmentation, des sauts
de puces attelées à un char de carton; des malices de nègre faites au
ministre lui-même; puis les gens réellement utiles, les travailleurs,
victimes des parasites; les gens dévoués à leur pays qui tranchent
vigoureusement sur la masse des incapacités, succombant sous d’ignobles
trahisons. Toutes les hautes places allaient appartenir à l’influence
parlementaire et non à la Royauté; les employés se voyaient alors dans
la condition de rouages vissés à une machine: il ne s’agissait plus
pour eux que d’être plus ou moins graissés. Cette fatale conviction
étouffait bien des mémoires écrits en conscience sur les plaies
secrètes du pays, désarmait bien des courages, corrodait les probités
les plus sévères, fatiguées de l’injustice et conviées à l’insouciance
par de dissolvants ennuis. Un commis des frères Rothschild correspond
avec toute l’Angleterre: un seul employé pourrait correspondre avec
tous les préfets; mais là où l’un vient apprendre les éléments de sa
fortune, l’autre perd inutilement son temps, sa vie et sa santé. Là
était le mal. Certes un pays ne semble pas immédiatement menacé de
mort parce qu’un employé de talent se retire et qu’un homme médiocre
le remplace. Malheureusement pour les nations, aucun homme ne paraît
indispensable à leur existence. Mais quand tout s’est à la longue
amoindri, les nations disparaissent. Chacun peut, par instruction,
aller voir à Venise, à Madrid, à Amsterdam, à Stockholm et à Rome les
places où existèrent d’immenses pouvoirs, aujourd’hui détruits par la
petitesse qui s’y est infiltrée en gagnant les sommités. Au jour d’une
lutte, tout s’est trouvé débile, l’État a succombé devant une faible
attaque. Adorer le sot qui réussit, ne pas s’attrister à la chute
d’un homme de talent est le résultat de notre triste éducation et de
nos mœurs qui poussent les gens d’esprit à la raillerie et le génie
au désespoir. Mais quel problème difficile à résoudre que celui de la
réhabilitation des employés, au moment où le libéralisme criait par ses
journaux dans toutes les boutiques industrielles que les traitements
des employés constituaient un vol perpétuel, quand il configurait les
chapitres du budget en forme de sangsues, et demandait chaque année
où allait le milliard des impôts. Aux yeux de monsieur Rabourdin,
l’employé, relativement au budget, était ce que le joueur est au jeu;
tout ce qu’il en emporte, il le lui restitue. Tout gros traitement
impliquait une production. Payer mille francs par an à un homme pour
lui demander toutes ses journées, n’était-ce pas organiser le vol et la
misère? un forçat coûte presque autant et travaille moins. Mais vouloir
qu’un homme auquel l’État donnerait douze mille francs par an se vouât
à son pays, était un contrat profitable à tous deux, et qui pouvait
tenter les capacités.
Ces réflexions avaient donc conduit Rabourdin à une refonte du
personnel. Employer peu de monde, tripler ou doubler les traitements et
supprimer les pensions; prendre les employés jeunes, comme faisaient
Napoléon, Louis XIV, Richelieu et Ximenès, mais les garder long-temps
en leur réservant les hauts emplois et de grands honneurs, étaient les
points capitaux d’une réforme aussi utile à l’État qu’à l’employé. Il
est difficile de raconter en détail, chapitre par chapitre, un plan qui
embrassait le budget et qui descendait dans les infiniment petits de
l’Administration pour les synthétiser; mais peut-être une indication
des principales réformes suffira-t-elle à ceux qui connaissent comme à
ceux qui ignorent la constitution administrative. Quoique la position
d’un historien soit dangereuse en racontant un plan qui ressemble à
de la politique faite au coin du feu, encore est-il nécessaire de le
crayonner, afin d’expliquer l’homme par l’œuvre. Supprimez le récit de
ses travaux, vous ne voudrez plus croire le narrateur sur parole, s’il
se contentait d’affirmer le talent ou l’audace d’un Chef de bureau.
Rabourdin divisait la haute administration en trois ministères. Il
avait pensé que si jadis il se trouvait des têtes assez fortes pour
embrasser l’ensemble des affaires intérieures et extérieures, la
France d’aujourd’hui ne manquerait jamais de Mazarin, de Suger, de
Sully, de Choiseul, de Colbert pour diriger des ministères plus
vastes que les ministères actuels. D’ailleurs, constitutionnellement
parlant, trois ministres s’accordent plus facilement que sept. Puis,
il est moins difficile aussi de se tromper quant au talent. Enfin,
peut-être la royauté éviterait-elle ainsi ses perpétuelles oscillations
ministérielles qui ne permettent de suivre aucun plan de politique
extérieure, ni d’accomplir aucune amélioration intérieure. En Autriche,
où des nations diverses réunies offrent des intérêts différents à
concilier et à conduire sous une même couronne, deux hommes d’État
supportaient en ce moment le poids des affaires publiques, sans en
être accablés. La France était-elle plus pauvre que l’Allemagne en
capacités politiques? D’abord n’était-il pas naturel de réunir le
ministère de la marine au ministère de la guerre? Pour Rabourdin, la
marine paraissait un des comptes courants du ministère de la guerre,
comme l’artillerie, la cavalerie, l’infanterie et l’intendance.
N’était-ce pas un contre-sens de donner aux amiraux et aux maréchaux
une administration séparée, quand ils marchaient vers un but commun: la
défense du pays, l’attaque de l’ennemi, la protection des possessions
nationales? Le ministère de l’intérieur devait réunir le commerce, la
police et les finances, sous peine de mentir à son nom. Au ministère
des affaires étrangères appartenaient la justice, la maison du roi, et
tout ce qui, dans le ministère de l’intérieur, concerne les arts, les
lettres et les grâces: toute protection devait découler immédiatement
du souverain, et ce ministère impliquait la présidence du Conseil.
Chacun de ces trois ministères ne comportait pas plus de deux cents
employés à son administration centrale, où Rabourdin les logeait tous,
comme jadis sous la monarchie. En prenant pour moyenne une somme de
douze mille francs par tête, il ne comptait que sept millions pour
des chapitres qui en coûtaient plus de vingt dans le budget actuel;
car, en réduisant ainsi les ministères à trois têtes, il supprimait
des administrations entières devenues inutiles, et les énormes frais
de leurs établissements dans Paris. Il prouvait qu’un arrondissement
devait être administré par dix hommes, une préfecture par douze au
plus, ce qui ne supposait que cinq mille employés pour toute la France,
Justice et Armée à part, nombre que dépassait alors le chiffre seul
des employés aux ministères. Mais, dans son plan, les greffiers des
tribunaux étaient chargés du régime hypothécaire; mais le ministère
public était chargé de l’enregistrement et des domaines, car il avait
réuni dans un même centre les parties similaires: ainsi l’hypothèque,
la succession, l’enregistrement ne sortaient pas de leur cercle
d’action, et ne nécessitaient que trois surnuméraires par Tribunal, et
trois par Cour royale. L’application constante de ce principe avait
conduit Rabourdin à la réforme des finances. Il avait confondu toutes
les perceptions d’impôts en une seule, en taxant la consommation en
masse au lieu de taxer la propriété. Selon lui, la consommation était
l’unique matière imposable en temps de paix. La contribution foncière
devait être réservée pour les cas de guerre. Alors seulement l’État
pouvait demander des sacrifices au sol, car alors il s’agissait de le
défendre; mais, en temps de paix, c’était une lourde faute politique
que de l’inquiéter au delà d’une certaine limite; on ne le trouvait
plus dans les grandes crises. Ainsi l’_Emprunt_ pendant la paix, parce
qu’il se faisait au pair et non à cinquante pour cent de perte, comme
dans les temps mauvais; puis, pendant la guerre, la _contribution
foncière_.
--L’invasion de 1814 et de 1815, disait Rabourdin à ses amis, a fondé
en France et démontré une institution que ni Law ni Napoléon n’avaient
pu établir: le _crédit_.
Malheureusement Xavier considérait les vrais principes de cette
admirable machine comme encore peu compris. Rabourdin imposait la
consommation par le mode des contributions directes, en supprimant
tout l’attirail des contributions indirectes. La recette de l’impôt se
résolvait par un rôle unique composé de divers articles. Il abattait
ainsi les gênantes barrières qui barricadent les villes auxquelles il
procurait de plus gros revenus en simplifiant leurs modes actuels de
perception énormément coûteux. Diminuer la lourdeur de l’impôt n’est
pas en matière de finance diminuer l’impôt, c’est le mieux répartir;
l’alléger, c’est augmenter la masse des transactions en leur laissant
plus de jeu; l’individu paye moins et l’État reçoit davantage. Cette
réforme, qui peut sembler immense, reposait sur un mécanisme fort
simple. Rabourdin avait pris l’impôt personnel et mobilier comme la
représentation la plus fidèle de la consommation générale. Les fortunes
individuelles s’expriment admirablement en France par le loyer, par
le nombre des domestiques, par les chevaux et les voitures de luxe
qui se prêtent à la fiscalité; car les habitations et ce qu’elles
contiennent varient peu, et disparaissaient difficilement. Après
avoir indiqué les moyens de confectionner un rôle de contributions
mobilières plus sincère que ne l’était le rôle actuel, il répartissait
les sommes que produisaient au trésor les impôts dits _indirects_ en
_un tant pour cent_ de chaque cote individuelle. En effet, l’impôt
est un prélèvement d’argent fait sur les choses ou sur les personnes
sous des déguisements plus ou moins spécieux; mais le temps de ces
déguisements, bon quand il fallait extorquer l’argent, était passé dans
une époque où la classe sur laquelle pèsent les impôts sait pourquoi
l’État les prend et par quel mécanisme il les lui rend. En effet, le
budget n’est pas un coffre-fort, mais un arrosoir; plus il prend et
répand d’eau, plus un pays prospère. Ainsi supposez six millions de
_cotes aisées_ (il en avait prouvé l’existence, en y comprenant les
_cotes riches_), ne valait-il pas mieux leur demander directement
_un droit de vin_ qui ne serait pas plus ridicule que l’impôt _des
portes et fenêtres_ et produirait cent millions, plutôt que de les
tourmenter en imposant la chose même? Par cette régularisation de
l’impôt, chaque particulier payerait moins en réalité, l’État recevrait
davantage, et les consommateurs jouiraient d’une immense réduction
dans le prix des choses que l’État ne soumettrait plus à des tortures
infinies. Il conservait un droit de culture sur les vignobles, afin
de protéger cette industrie contre la trop grande abondance de ses
produits. Puis, pour atteindre les consommations des cotes pauvres,
les patentes des débitants étaient taxées d’après la population des
lieux qu’ils habitaient. Ainsi, sous trois formes: droit de vin,
droit de culture et patente, le Trésor levait une recette énorme sans
frais ni vexations, là où il y avait un impôt vexatoire partagé entre
ses employés et lui. L’impôt pesait ainsi sur le riche au lieu de
tourmenter le pauvre. Un autre exemple. Supposez un franc ou deux, par
cote, de droits de sel, vous obtenez dix ou douze millions, la gabelle
moderne disparaît, la population pauvre respire, l’agriculture est
soulagée, l’État reçoit tout autant, et nulle cote ne se plaint, car
toute cote est propriétaire, et peut reconnaître immédiatement les
bénéfices d’un impôt ainsi réparti en voyant au fond des campagnes la
vie s’améliorant. Enfin, d’année en année, l’État verrait le nombre
des _cotes aisées_ croissant. En supprimant l’administration des
contributions indirectes, machine extrêmement coûteuse, et qui est
un État dans l’État, le Trésor et les particuliers y gagnaient donc
énormément, à ne considérer que l’économie des frais de perception.
Le tabac et la poudre s’affermaient en régie, sous une surveillance.
Le système sur ces deux régies, développé par d’autres que Rabourdin
lors du renouvellement de la loi sur les tabacs, était si convaincant
que cette loi n’eût point passé dans une Chambre à qui l’on n’aurait
pas mis le marché à la main, comme le fit alors le ministère. Ce fut
alors moins une question de finance qu’une question de gouvernement.
L’État ne possédait plus rien en propre, ni forêts, ni mines, ni
exploitations. Aux yeux de Rabourdin, l’État, possesseur de domaines,
constituait un contre-sens administratif, car l’État ne sait pas
faire valoir et se prive de contributions; il perd deux produits à la
fois. Quant aux fabriques du gouvernement, c’était le même non-sens
reporté dans la sphère de l’industrie. L’État obtient des produits
plus coûteux que ceux du commerce, plus lentement confectionnés, et
manque à percevoir ses droits sur les mouvements de l’Industrie, à
laquelle il retranche des alimentations. Était-ce administrer un pays
que d’y fabriquer au lieu d’y faire fabriquer, d’y posséder au lieu de
créer le plus de possessions diverses? L’État n’exigeait plus un seul
cautionnement en argent. Rabourdin n’admettait que des cautionnements
hypothécaires. Voici pourquoi. Ou l’État gardait le cautionnement en
nature, et c’était gêner le mouvement de l’argent; ou il l’employait
à un taux supérieur à l’intérêt qu’il en donnait, et c’était un vol
ignoble; ou il y perdait, et c’était une sottise; enfin, s’il disposait
un jour de la masse des cautionnements, il préparait dans certains
cas une banqueroute horrible. L’impôt territorial disparaissait donc
en partie, Rabourdin en conservait une faible portion, ne fût-ce
que comme point de départ en cas de guerre; mais évidemment les
productions du sol devenaient libres, et l’Industrie, en trouvant les
matières premières à bas prix, pouvait lutter avec l’étranger sans le
secours trompeur des Douanes. Les riches administraient gratuitement
les Départements, en ayant pour récompense la pairie sous certaines
conditions. Les magistrats, les corps savants, les officiers inférieurs
voyaient leurs services honorablement récompensés. Il n’y avait pas
d’employé qui n’obtînt une immense considération, méritée par l’étendue
de ses travaux et l’importance de ses appointements; chacun d’eux
pensait lui-même à son avenir, et la France n’avait plus sur le corps
le cancer des pensions. En résultat, Rabourdin trouvait sept cents
millions de dépenses seulement et douze cents millions de recettes.
Il était clair qu’un remboursement de cinq cents millions annuels
jouait alors avec un peu plus de force que le maigre amortissement
dont le vice était démontré. Là, selon lui, l’État se faisait encore
rentier, comme l’État s’entêtait d’ailleurs à posséder et à fabriquer.
Enfin, pour exécuter sans secousses sa réforme et pour éviter une
Saint-Barthélemy d’employés, Rabourdin demandait vingt années.
Telles étaient les pensées mûries par cet homme depuis le jour où sa
place fut donnée à monsieur de La Billardière, homme incapable. Ce
plan si vaste en apparence, si simple en réalité, qui supprimait tant
de gros états-majors et tant de petites places également inutiles,
exigeait de continuels calculs, des statistiques exactes, des preuves
évidentes. Rabourdin avait pendant long-temps étudié le budget sur
sa double face, celle des Voies et Moyens, celle des Dépenses. Aussi
avait-il passé bien des nuits à l’insu de sa femme. Ce n’était rien
encore que d’avoir osé concevoir ce plan et de l’avoir superposé sur
le cadavre administratif, il fallait s’adresser à un ministre capable
de l’apprécier. Le succès de Rabourdin tenait donc à la tranquillité
d’une politique alors toujours agitée. Il ne considéra le gouvernement
comme définitivement assis qu’au moment où trois cents députés
eurent le courage de former une majorité compacte, systématiquement
ministérielle. Une administration fondée sur cette base s’était établie
depuis que Rabourdin avait achevé ses travaux. A cette époque, le luxe
de la paix due aux Bourbons faisait oublier le luxe guerrier du temps
où la France brillait comme un vaste camp, prodigue et magnifique parce
qu’il était victorieux. Après sa campagne en Espagne, le Ministère
paraissait devoir commencer une de ces paisibles carrières où le bien
peut s’accomplir, et depuis trois mois un nouveau règne avait commencé
sans éprouver aucune entrave, car le libéralisme de la Gauche avait
salué Charles X avec autant d’enthousiasme que la Droite. C’était
à tromper les gens les plus clairvoyants. Le moment semblait donc
propice. N’était-ce pas un gage de durée pour une administration que
de proposer et de mettre à fin une réforme dont les résultats étaient
si grands? Jamais donc Rabourdin ne s’était montré plus soucieux, plus
préoccupé le matin quand il allait par les rues au Ministère, et le
soir à quatre heures et demie quand il en revenait.
De son côté, madame Rabourdin, désolée de sa vie manquée, ennuyée
de travailler en secret pour se procurer quelques jouissances de
toilette, ne s’était jamais montrée plus aigrement mécontente, mais,
en femme attachée à son mari, elle regardait comme indignes d’une
femme supérieure les honteux commerces par lesquels certaines femmes
d’employés suppléaient à l’insuffisance des appointements. Cette raison
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- La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 02各行は、最も一般的な単語 1000 個あたりの単語の割合を表します。合計単語数は 4668 です一意の単語の合計数は 1707 です34.5 の単語が最も一般的な 2000 単語に含まれています47.0 の単語が最も一般的な 5000 語に含まれています53.4 の単語が最も一般的な 8000 単語に含まれています
- La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 03各行は、最も一般的な単語 1000 個あたりの単語の割合を表します。合計単語数は 4677 です一意の単語の合計数は 1711 です35.3 の単語が最も一般的な 2000 単語に含まれています48.0 の単語が最も一般的な 5000 語に含まれています53.5 の単語が最も一般的な 8000 単語に含まれています
- La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 04各行は、最も一般的な単語 1000 個あたりの単語の割合を表します。合計単語数は 4607 です一意の単語の合計数は 1617 です35.1 の単語が最も一般的な 2000 単語に含まれています46.1 の単語が最も一般的な 5000 語に含まれています52.0 の単語が最も一般的な 8000 単語に含まれています
- La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 05各行は、最も一般的な単語 1000 個あたりの単語の割合を表します。合計単語数は 4705 です一意の単語の合計数は 1616 です35.3 の単語が最も一般的な 2000 単語に含まれています46.3 の単語が最も一般的な 5000 語に含まれています51.4 の単語が最も一般的な 8000 単語に含まれています
- La Comédie humaine - Volume 11. Scènes de la vie parisienne - Tome 03 - 06各行は、最も一般的な単語 1000 個あたりの単語の割合を表します。合計単語数は 4618 です一意の単語の合計数は 1701 です35.3 の単語が最も一般的な 2000 単語に含まれています47.0 の単語が最も一般的な 5000 語に含まれています54.2 の単語が最も一般的な 8000 単語に含まれています
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