Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 14

Total number of words is 3189
Total number of unique words is 1052
44.7 of words are in the 2000 most common words
55.6 of words are in the 5000 most common words
60.3 of words are in the 8000 most common words
Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
dominez ces facultés saines, et vous ferez taire celles qui sont
malades. Ce fut ce que fit M. Miraglia. Mais il s'aperçut que, dès qu'il
suspendait l'action exercée par ces facultés, celles qui étaient
perverties reprenaient aussitôt le dessus. C'est ainsi que, tant que
Persio demeure sur la scène, il est tout entier à son rôle; mais que,
aussitôt la toile baissée, il retombe dans sa folie. En outre, il est
poëte, improvise avec facilité des vers pleins de sentiments généreux et
de pensées élevées. Mais, dans ses heures d'aliénation, il ne peut lier
deux phrases ensemble et ne dit absolument rien qui ressemble à un
discours sensé.

LUIGI GAGLIOZZI.--_Le marquis de las Navas._
Luigi Gagliozzi est de Naples; il a trente-deux ans. Il était concierge
de l'administration de la loterie. Il entra à l'établissement de M.
Miraglia le 7 mars 1861, affecté de _lypémanie ascétique_, ce qui, en
langage ordinaire, se traduit par ces mots: «Exagération et désordre de
quelques sentiments, et particulièrement de celui du sens religieux et
de celui de la circonspection.» La bienveillance, la mimique chez lui
sont restées saines. Il fut donc facile à guider dans les deux rôles
qu'il a joués: celui de Collatin, dans le _Brutus_, et celui du marquis
de las Navas dans _le Bourgeois de Gand_. Il est plus docile que Persio,
par cette raison qu'il est plus facile de dominer les émotions des
sentiments pervertis que les impulsions, presque toujours incurables,
des instincts exagérés par la maladie.

ANTONIO ROSSI.--_Le duc d'Albe._
Antonio Rossi est né à Naples, de bonne famille; il a cinquante et un
ans; il entra pour la première fois dans l'établissement le 25 mai 1842,
et en sortit, sans être guéri, le 15 juin de la même année. Alors, il
voyagea beaucoup, mais finit par entrer dans une maison de fous
anglaise, et revint à celle d'Aversa le 9 octobre 1862, affecté de
pervertissement et d'exagération dans le sens de l'_estime de soi-même_,
et d'hallucinations intérieures qui amènent son esprit à éprouver des
souffrances cérébrales dans les mêmes organes de la vie physique qui
sont en relation avec le cerveau. Les perceptions, les tendances, et
quelques sentiments d'Antonio Rossi s'exercent régulièrement. Il croit
que c'est la reine d'Angleterre qui, préoccupée de bons sentiments pour
lui, l'a recommandé à M. Miraglia, et qui paye sa pension dans
l'établissement. Malgré cette exagération de l'estime de soi-même, il
est très-docile, très-affable, accepte facilement tout rôle où la
puissance et l'orgueil peuvent s'exercer; c'est pourquoi il fut facile
de lui faire représenter, dans _le Bourgeois de Gand_, le rôle du duc
d'Albe; mais il refusa complétement toute relation avec le souffleur,
disant qu'il était un homme d'éducation; qu'il savait ce qu'il avait à
dire, et, par conséquent, n'avait pas besoin qu'on lui dictât ses
réponses. C'est un bel exemple donné par un fou aux artistes italiens
qui ne savent jamais leurs rôles et qui tirent, en général, chaque
phrase l'une après l'autre de la bouche du souffleur.
Antonio Rossi parle très-bien l'anglais et le français.

GIUSEPPE FORCIGNANO.--_Le prince d'Orange._
Giuseppe Forcignano est de la province de Lecce; il a trente-trois ans
et était employé dans un hôpital militaire. Il entra dans
l'établissement d'Aversa le 5 janvier 1861. Il est atteint de monomanie
vaine et orgueilleuse: les sens de l'_estime de soi_ et du besoin
d'approbation sont en lui tellement exagérés, que son orgueil et sa
vanité atteignent souvent le plus haut degré d'exaltation. Il croit
avoir toutes les qualités physiques et morales. Il se croit puissant,
beau, savant; il marche la tête renversée en arrière et regarde
l'humanité de haut en bas; il méprise tout et s'épanouit à la louange.
Au reste, complétement sourd, les perceptions saines n'arrivent qu'avec
la plus grande difficulté à prendre le dessus sur les sentiments
troublés, qui sont, comme nous l'avons dit, l'estime de soi et la
vanité. Dans la tragédie de _Brutus_, il représentait un des fils de
Brutus. Plein d'orgueil d'être le fils d'un consul romain, il écouta
dédaigneusement tous les reproches que la douleur arrachait à son père,
qu'il ne voulut jamais embrasser; et, quand les licteurs s'approchèrent
de lui pour le conduire à la mort, il les écarta d'un geste de mépris en
disant: «Il n'est point besoin de licteurs pour mener à la mort le fils
de Brutus.» Dans _le Bourgeois de Gand_, où il représentait le prince
d'Orange, forcé de fuir au quatrième acte, il se refusa obstinément à se
déguiser en paysan, malgré les indications de la mise en scène, en
disant:
--Je n'avilirai point la majesté d'un prince d'Orange en la couvrant de
grossiers habits.

VINCENZO LUIZZI.--_Gidolfe._
Vincenzo Luizzi, âgé de quarante-sept ans, est de Martina, dans la terre
d'Otrante. Il entra à l'hospice le 6 février 1853, affecté de violente
_lypémanie ascétique_. La _religiosité_ et la _circonspection_ sont chez
lui dans un état complet de pervertissement et d'exaltation. Il est, en
outre, atteint d'hallucinations intérieures qui lui font percevoir d'une
étrange manière les sensations externes, ce qui a produit dans son
esprit un singulier désordre de la _conscience_. C'est un _possédé_
d'une espèce rare. Il dit que tous les hommes ont un diable dans le
cerveau, lequel cherche incessamment à troubler et à subjuguer l'esprit;
l'esprit subjugué, le démon lui succède et devient maître du corps.
C'est ainsi que la chose est arrivée en lui. Il n'est plus Vincenzo
Luizzi, il est le démon Asmodée. Son corps n'est plus qu'une machine
appartenant entièrement à celui qui s'en est emparé et qui parle, agit
et opère en son lieu et place; malgré cette possession, qui rappelle
celle du moyen âge, il n'est point inhabile à toute occupation; il y a
plus: il grave au burin, il tourne l'os et l'ivoire, toutes choses qu'il
ne savait pas faire lorsqu'il était dans son bon sens;--ce qu'il donne
lui-même comme une preuve qu'il est possédé par un esprit infernal. Deux
fois, il y a quelques années, il tenta de se suicider: une fois, en se
précipitant du haut en bas d'un escalier, et il se blessa grièvement à
la tête;--une autre fois, en se pendant. Dans une de ses leçons à
l'Université, M. Miraglia le conduisit avec lui, et, avec les plus
subtils raisonnements, il expliqua son système de transmutation. De
temps à autre, le délire chronico-démonomaniaque devient aigu, et alors
le pauvre garçon fait pitié. C'est bien véritablement le démon Asmodée
qui lutte avec l'esprit de Luizzi; et le corps, champ de bataille où
s'opère la lutte, demeure martyrisé par le combat.
Asmodée-Luizzi a fait, dans _Brutus_, le comparse représentant le
peuple, et, dans _le Bourgeois de Gand_, a rempli le rôle de Gidolfe,
qui, dans l'émeute, a tué d'un coup d'épée le comte de Vargas-Persio.
Confier des armes à des fous, et surtout à un démonomaniaque, avait paru
d'abord chose téméraire au docteur Miraglia, surtout quand ce
démonomaniaque avait tenté deux fois de se tuer. Mais il réfléchit que
Luizzi n'était point ce qu'on appelle, en matière de phrénologie, un fou
à _double conscience_, mais simplement un fou croyant avoir un diable
dans le corps; puis, à son avis, ce diable n'était pas venu pour
combattre le corps, mais seulement l'esprit. Il ne tenterait donc rien
contre le corps, puisque ce n'était point au corps qu'il en voulait, et,
sur ce raisonnement, le docteur Miraglia lui mit hardiment une épée à la
main, et n'eut point à s'en repentir.
Luizzi est libre, travaille, sort seul de l'établissement, et ne manque
jamais d'y rentrer à l'heure réglementaire.
Sa sœur est morte folle, de folie semblable à la sienne.

MICHELE PENTRELLA.--_Le courrier espagnol._
Michèle Pentrella, né à Barletta, a soixante-treize ans. Il fut reçu à
l'établissement le 27 mars 1822. Il était atteint de monomanie
orgueilleuse; il portait toute sorte de décorations inventées par lui:
il était orné de franges et de broderies de papier doré. Avec le temps,
sa folie a tourné à l'imbécillité. Dans _Brutus_, il fit le second
comparse du peuple, et, dans _le Bourgeois de Gand_, le courrier
espagnol (Jeronimo). Il demande toujours: «Jouera-t-on encore la
comédie?» ayant remarqué que, les jours où l'on jouait la comédie, on
mangeait mieux, on buvait davantage, et qu'on était, en outre, applaudi
par le public.
* * * * *
Tels étaient, cher docteur, les artistes qui représentaient _le
Bourgeois de Gand_, le soir où, comme je vous le disais, la salle du
Fondo était comble dans l'attente de ce curieux spectacle.
Maintenant que vous avez fait connaissance avec nos acteurs, vous allez
les voir entrer en scène, puis je vous les montrerai de retour à leur
établissement; et, après cet instant d'apparente sagesse, redevenus fous
comme auparavant.
Le plus difficile à manier de tous est Persio, parce que c'est celui
qui est le plus complétement fou: aussi M. Miraglia ne le quitta-t-il
point, c'est-à-dire qu'il vint dans la même voiture que lui, et le
conduisit à l'auberge des _Florentins_, lui faisant donner une chambre à
part.
Avant de partir de l'hospice, Persio s'était fait servir à dîner à deux
heures de l'après-midi, disant que c'était son habitude de dîner de
bonne heure, les jours où il jouait.
Arrivé à l'auberge des _Florentins_, il se mit tout nu et se savonna des
pieds à la tête; puis, couvert de savon, il alluma son cigare et se
promena par la chambre. M. Miraglia lui fit observer que l'heure
s'avançait, et qu'il serait mis à l'amende s'il manquait son entrée. Il
reconnut la justesse de l'observation, et s'habilla; puis, sans
difficulté, il monta en voiture, arriva au théâtre et entra dans sa
loge, où son costume était tout prêt.
Il l'examina pièce à pièce; puis, se ravisant:
--Vous savez que je n'entre pas en scène, dit-il, que je ne sois payé
d'avance.
--C'est trop juste, répondit M. Miraglia; combien voulez-vous?
--Je veux soixante et dix napoléons en thalers de Prusse.
On discuta et sur la somme et sur la monnaie dans laquelle elle était
exigée; on lui fit comprendre qu'on ne trouverait pas assez de thalers
chez tous les changeurs de Naples pour lui payer quatorze cents francs;
d'ailleurs, si on le payait en thalers, ce ne serait plus soixante et
dix napoléons qu'il toucherait.
Il parut comprendre la justesse du raisonnement et se borna à être payé
en napoléons: ses prétentions s'abaissèrent même de soixante et dix à
vingt-cinq. On lui compta vingt-cinq napoléons qu'il recompta avec le
plus grand soin et qu'il enferma dans son porte-monnaie, lequel il ne
perdit pas de vue tout en s'habillant et qu'il mit sur sa poitrine avant
de descendre sur le théâtre.
Il est vrai que la première chose qu'il fit le lendemain en montant dans
sa cellule, ce fut de jeter son porte-monnaie dans le jardin, à travers
les barreaux de sa fenêtre. On put ainsi reprendre les vingt-cinq louis
qu'on lui avait donnés. Quant à lui, il ne s'en inquiéta plus, et ne les
a pas redemandés, non plus que le porte-monnaie où ils étaient
renfermés.
Les autres ne firent point toutes ces difficultés; il est vrai que
c'étaient des sujets inférieurs en mérite à Persio; ils demandèrent
seulement, les uns des glaces, les autres des sorbets.
Jusqu'au moment d'entrer en scène, Persio divagua, et M. Miraglia fut
obligé de le tenir par le bras; mais, au moment où l'on frappa les trois
coups, il se redressa, toussa, arrangea ses cheveux, fit enfin tout ce
que fait un comédien sur le point d'entrer en scène, et, quand la toile
se leva, il parut reprendre toute sa raison.
Vargas entre, et, en entrant, trouve don Luis endormi dans un fauteuil.
Quelqu'un qui n'eût point été prévenu n'eût certes pas pu se douter
qu'il avait devant lui un fou n'ayant de sain dans le cerveau que les
organes qu'il exerçait en ce moment, mais eût, au contraire, parié qu'il
avait affaire à un comédien exercé. Persio fut excellent dans ce premier
acte, et très-bien secondé par le duc d'Albe, qui, en effet, n'eut pas
recours une seule fois au souffleur. Disons, en passant, que le
souffleur était le fils de M. Miraglia, qui, au risque de devenir fou
lui-même, avait fait faire à la troupe douze ou quinze répétitions.
La grande scène du premier acte, entre Vargas et le duc d'Albe, fut
très-bien jouée et fort applaudie. Comme des artistes qui en eussent
fait leur état, nos fous paraissaient énormément sensibles aux
applaudissements, et, chaque fois que ceux-ci se faisaient entendre,
saluaient le public avec reconnaissance.
Au commencement du deuxième acte, au moment où Vargas-Persio ouvre la
prison du duc d'Orange-Forcignano, celui-ci, qui, nous l'avons dit, est
fou d'orgueil et complétement sourd, blessé du ton dont Vargas lui
parlait, n'entendant point ses paroles, et ne voyant que l'expression de
son visage, jugea sans doute que ce n'était point avec une physionomie
pareille qu'on parlait à un stathouder de Hollande, de Zélande et
d'Utrecht; il regarda dédaigneusement son interlocuteur, lui tourna le
dos et sortit de scène. Persio ne perdit point la tête; il s'avança
jusqu'au trou du souffleur, en s'écriant: «Orgueil inflexible, qui ne
saura jamais supporter les contradictions!» Puis, tout bas, au
souffleur: «Coupez toute la scène, dit-il, je le connais, il ne rentrera
pas.» M. Miraglia fils sauta la scène, passa à la scène suivante. Luigi
Cagliozzi fit son entrée, et personne ne s'aperçut de l'attaque
d'orgueil que venait d'avoir le prince d'Orange.
Mais Persio s'était trompé en disant qu'il ne rentrerait pas. Au moment
où la toile allait tomber à la fin du deuxième acte, le prince
d'Orange-Forcignano s'élança sur la scène, et, s'emparant du théâtre:
«Messieurs et mesdames, dit-il, permettez que je vous dise des vers de
ma jeunesse.»
Et il commença un sonnet, qui fut chaudement applaudi. Il salua, se
retira à reculons, et la toile tomba, non pas sur la mort de
Lowendeghem, mais sur le sonnet de Forcignano.
Persio avait été énormément contrarié de cet incident, qui lui faisait
manquer son effet de la fin du deuxième acte; mais il avait pris la
chose plus philosophiquement qu'on ne s'y attendait, et s'était contenté
de dire:
--Voilà ce que c'est que de jouer la comédie avec des fous!
A partir du troisième acte, tout alla à merveille. M. Miraglia voyait
arriver avec une certaine appréhension le moment où Luizzi-Asmodée
devait tuer le comte de Vargas; mais, comme il l'avait prévu, Asmodée,
démon implacable à propos des esprits, était bon diable à l'endroit des
corps. Il passa adroitement son épée sous le bras du secrétaire du duc
d'Albe, au lieu de la lui passer à travers la poitrine, et le comte de
Vargas _tomba mort_.
Ne vous effrayez pas, cher docteur; vous allez voir ce que nous voulons
dire en disant _tomba mort_, et non pas _comme s'il était mort_.
L'affiche portait:
LE BOURGEOIS DE GAND
ou
LE SECRÉTAIRE DU DUC D'ALBE,
_Drame en cinq actes, en prose_,
par
M. HIPPOLYTE ROMAND,
suivi de
LA MORT DU TASSE
_Scène lyrique en un acte_.
C'était Persio qui, après avoir joué le rôle principal dans le drame,
devait encore jouer le Tasse dans la seconde pièce, qui n'est réellement
qu'un monologue.
Mais Persio avait tellement pris son rôle au sérieux, que, se regardant
comme tué, et bien tué par Luizzi-Asmodée, il répondit au régisseur, qui
venait l'avertir qu'il n'avait plus que cinq minutes pour rentrer en
scène:
--Comment voulez-vous que je rentre en scène dans cinq minutes, quand je
suis mort depuis dix à peine?
Et, quelque chose qu'on pût lui dire, quelque promesse qu'on pût lui
faire, il répondit qu'à Jésus-Christ seul avait été donné le privilége
de ressusciter, et encore après trois jours.
Le régisseur vint annoncer, non pas que M. Persio était indisposé, non
pas que M. Persio se trouvait mal, non pas que M. Persio, s'étant donné
une entorse, ne pouvait jouer le Tasse, mais que, M. Persio _étant
mort_, il ne voulait pas donner ce démenti au bon sens de paraître dans
un autre rôle; et le public, enchanté de trouver tant de raison dans un
fou, se retira applaudissant de toutes ses forces.
J'ai dit la tentative que j'avais faite dès le soir même pour pénétrer
sur le théâtre, féliciter les artistes et interroger M. Miraglia, et
comment il me fut répondu que M. Miraglia, étant en train de calmer
l'exaltation de ses artistes, me recevrait le lendemain, à
l'établissement même d'Aversa.
Il faut une heure et demie pour aller de Naples à Aversa. Le lendemain,
à dix heures, je montai en voiture, et, avant midi, j'étais chez M.
Miraglia.
Il m'attendait, en effet, pour me faire les honneurs de sa maison. Le
premier de nos acteurs que nous rencontrâmes fut Luigi Gagliozzi, qui
avait joué la veille don Luis, marquis de las Navas. Il se chauffait au
soleil, assis dans la première cour; en nous voyant nous approcher de
lui, il se leva. Je voulus l'interroger, lui faire des compliments: il
ne se souvenait plus de rien. Il me répondit d'une voix douce et
mélancolique des paroles sans suite.
Pendant que nous causions avec lui, le fou qui croit avoir dans le corps
le diable Asmodée s'approcha de nous: c'était Vincenzo Luizzi,
c'est-à-dire celui qui avait joué la veille le rôle de Gidolfe, qui,
pendant l'émeute, tue le comte de Vargas. Je voulus aussi lui faire mes
compliments sur la façon dont il avait concouru à l'ensemble de la
représentation; mais il m'interrompit en me disant:
--Monsieur, vous savez que tout homme a un diable dans le cerveau.
Et il m'exposa son système, auquel, contre mon habitude, ennemi que je
suis de tout système, je parus me ranger entièrement.
Mais celui que j'avais hâte de voir, c'était Persio. Je demandai donc
Persio.
Par malheur, on l'avait prévenu de mon arrivée; par malheur encore, il
me connaissait de nom. Il prétendit que M. Dumas, étant à Paris, ne
pouvait être à Naples; que, par conséquent, on voulait se moquer de lui
en lui faisant faire des compliments par un faux Dumas.
Sur ce, il se renferma dans sa cellule, et, par le vasistas, on put le
voir se déshabiller et se coucher pour ne recevoir personne.
Je voulus me rabattre sur le prince d'Orange; mais, par malheur, lui
aussi était prévenu de mon arrivée. Il avait alors demandé ses habits de
prince; mais, comme ils étaient restés à Naples et qu'on ne pouvait les
lui donner, il avait, comme Persio, absolument refusé de me recevoir
dans le costume modeste qu'il portait.
Restait le duc d'Albe, Antonio Rossi; celui-là fut très-poli et
très-gracieux: il me parla, comme eût pu faire un vrai vice-roi, de mes
ouvrages, qu'il connaissait d'autant mieux que, parlant français, il
avait pu les lire dans l'original. La conversation dura dix minutes;
elle eût pu se prolonger une demi-heure sans que je m'aperçusse,
n'étant pas prévenu, que j'avais affaire à un fou.
Quant au courrier espagnol, c'était une espèce d'idiot dont il n'y avait
absolument rien à tirer.
Voilà, cher docteur, la relation que j'ai voulu vous faire. Je la crois
curieuse, pour vous surtout qui vous occupez avec tant de succès de
cette grande science phrénologique, qui est, j'en ai bien peur, la
science de la vie,--mais aussi la science de la mort!
FIN
You have read 1 text from French literature.
  • Parts
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 01
    Total number of words is 4601
    Total number of unique words is 1768
    36.7 of words are in the 2000 most common words
    48.4 of words are in the 5000 most common words
    54.4 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 02
    Total number of words is 4752
    Total number of unique words is 1638
    39.0 of words are in the 2000 most common words
    51.3 of words are in the 5000 most common words
    56.6 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 03
    Total number of words is 4682
    Total number of unique words is 1710
    38.0 of words are in the 2000 most common words
    51.6 of words are in the 5000 most common words
    56.5 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 04
    Total number of words is 4697
    Total number of unique words is 1657
    38.2 of words are in the 2000 most common words
    50.4 of words are in the 5000 most common words
    56.2 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 05
    Total number of words is 4670
    Total number of unique words is 1633
    36.7 of words are in the 2000 most common words
    48.2 of words are in the 5000 most common words
    54.4 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 06
    Total number of words is 4696
    Total number of unique words is 1574
    38.2 of words are in the 2000 most common words
    51.8 of words are in the 5000 most common words
    56.8 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 07
    Total number of words is 4696
    Total number of unique words is 1489
    38.0 of words are in the 2000 most common words
    49.6 of words are in the 5000 most common words
    55.0 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 08
    Total number of words is 4791
    Total number of unique words is 1659
    35.3 of words are in the 2000 most common words
    49.4 of words are in the 5000 most common words
    55.5 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 09
    Total number of words is 4736
    Total number of unique words is 1588
    40.0 of words are in the 2000 most common words
    53.6 of words are in the 5000 most common words
    58.7 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 10
    Total number of words is 4599
    Total number of unique words is 1633
    36.9 of words are in the 2000 most common words
    49.9 of words are in the 5000 most common words
    55.1 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 11
    Total number of words is 4686
    Total number of unique words is 1492
    40.4 of words are in the 2000 most common words
    53.1 of words are in the 5000 most common words
    57.8 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 12
    Total number of words is 4611
    Total number of unique words is 1552
    39.0 of words are in the 2000 most common words
    51.5 of words are in the 5000 most common words
    56.9 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 13
    Total number of words is 4451
    Total number of unique words is 1550
    36.5 of words are in the 2000 most common words
    47.4 of words are in the 5000 most common words
    52.4 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.
  • Jacques Ortis; Les fous du docteur Miraglia - 14
    Total number of words is 3189
    Total number of unique words is 1052
    44.7 of words are in the 2000 most common words
    55.6 of words are in the 5000 most common words
    60.3 of words are in the 8000 most common words
    Each bar represents the percentage of words per 1000 most common words.